Analyse
Étant invité au silence public par la politique commerciale de CBS, et ne souhaitant pas faire la mouche du coche, je me contenterai cette fois d’adouber la critique de Frank.
Enfin, pas tout à fait... ;-)
Discovery 04x01 Kobayashi Maru annonce sans doute la saison de maturité… kurtzmanienne. C’est-à-dire l’exploitation décomplexée et industrielle (façon Tricatel) de tout ce qui avait plombé les saisons précédentes et qui faisaient bondir les spectateurs de leur canapé à un rythme de marteau-piqueur.
Dans la mesure où les "executives" de CBS semblent extrêmement satisfaits du tour que le label Star Trek a pris sous la houlette d’Alex Kurtzman, quitte à ignorer autistiquement les vagues de protestation et le bad buzz au sein du public, l’objectif n’est désormais plus de faire de la qualité ni même de l’audience à proprement parler, mais de produire en quantité du fast food et à la chaîne de la malbouffe pour remplir le fond de catalogue de Paramount+ (dans le cadre de la guerre sans merci que se livrent les plateformes SVOD).
Il ne fallait donc espérer aucune correction de cap. C’est au contraire la kafkaïenne méthode de Trofim Lyssenko qui est mise à l’honneur et qui consiste à enfoncer le clou en multipliant la dose de la même recette pour aller toujours plus loin dans les mêmes apories, sophismes, manipulations, et arnaques... au mépris du réel.
Autant dire que ceux qui ont adoré ce qui précède adoreront encore davantage ce qui va suivre. Et ceux qui ont détesté... détesteront encore davantage.
Voici donc le pitch de l’épisode...
Après plusieurs mois comme capitaine de l’USS Discovery refité dans la fonction de coursière express (tournée de dilithium pour tout le monde) et de petite télégraphiste de la Fédération reconstituée du 32ème siècle (désormais passée de 38 membres à 59), Michael Burnham va être confrontée à une nouvelle catastrophe galactique, pire que toutes les précédentes of course.
Discovery 04x01 Kobayashi Maru débute d’abord par le travail de routine de l’héroïne (de la diplomatie-pour-rire et pour-les nuls sur Alshain IV)… en tandem amoureux avec son amant Cleveland en vaisseau Transformer et ses potes du 23ème siècle en "propulsion mycologique" (spore drive) sur l’USS Discovery
Puis, Michael assura le discours d’ouverture de Starfleet Academy après 125 ans de suspension, et elle introduira aux cadets la nouvelle présidente de la Fédération, Laira Rillak. Cette dernière dévoilera alors un nouveau "spatiodock" (ou chantier astronaval) baptisé du nom de Jonathan Archer pour symboliser le retour aux missions originelles d’exploration de Starfleet… avec en toile de fond une reprise du touchant générique de fin des épisodes de ST Enterprise. Renouer ainsi avec la vocation de la superbe série prequelle de Rick Berman et Brannon Braga (la dernière production à avoir mérité de porter le label "Star Trek") aurait été légitime si cette quatrième saison de Discovery avait véritablement cherché à explorer et reconstruire la Fédération plus de mille ans après sa fondation (en 2161). Mais il n’en sera rien, l’Archer theme ne sera qu’un placement racoleur de plus pour propulser un nouveau péril apocalyptique...
Enfin, Burnham sera chargée de secourir la station de réparation Beta Six exposée à une distorsion gravitationnelle, sous l’œil inquisiteur de la présidente Rillak qui s’embarquera sur l’USS Discovery… pour évaluer sa capitaine en vue d’un poste sur l’USS Voyager J équipé d’une technologie FTL expérimentale (le pathway drive prototype). Mais l’expérience se transformera en test Kobayashi Maru live (sans simulation ni filet) auquel Mary Sue échouera, non pour la collection surréaliste d’incohérences alignées par l’épisode, mais pour n’avoir pas accepté sciemment d’abandonner plusieurs membres d’équipage VIP (il y aura trois morts à déplorer malgré tout, mais ouf, seulement des redshirts).
Devenu "Grand Ancien" au sein du conseil sous-marin de Kaminar (réunissant Kelpiens et Ba’uls), Saru se laissera convaincre tel un enfant par l’orphelin-centenaire Su’Kal que sa place contractuelle est sur l’USS Discovery...
Cleveland Booker partira sur sa planète natale pour assister avec son frère Caim à la cérémonie écologiste d’Alkuzen (passage à l’âge adulte) de son neveu. Mais alors qu’il sera en orbite, Book sera témoin de la destruction de sa lune sous l’effet d’une distorsion gravitationnelle (possiblement la même que celle qui avait touché Beta Six)... Évanoui, son vaisseau "métamorphe" le ramènera en pilotage automatique sur l’USS Discovery, dont l’équipage découvrira effaré à travers le "deeper space array" (magique comme un Google Street View dans toute la galaxie) la paradisiaque Kwejian éventrée et réduite à l’état de boule de magma !
Au menu des réjouissances de la quatrième saison de Discovery :
- lantern-system pour fournir des alibis et des passeports d’impunités en toute occasion (e.g. Rillak qui remet la capitaine Michael Burnham à sa place en relayant à l’écran les reproches que lui adressent les spectateurs, en somme comme le T’Kal-in-ket de Ni’Var dans Discovery 03x07 Unification III et comme l’amiral Christopher Pike à l’endroit de Baby-Kirk au début de ST Into Darkness, mais avec zéro effet et sans la moindre progression ensuite, l’univers se chargeant au contraire de donner in fine toujours raison aux héro·ïne·s prédestiné·e·s...) ;
- absurdités comportementales et psychologiques ;
- incohérences et inconséquences in-universe atteignant une masse critique fatale à la suspension d’incrédulité ;
- invraisemblances stratégiques et tactiques aux antipodes de toute realpolitik ;
- inculture scientifique et enfumage technique au profit du TGCM ("ta gueule c’est magique") ;
- paradigme de la fantasy (axiologie, manichéisme, électivité, main invisible...) gagnant sans cesse sur terrain au détriment du paradigme de la SF (relativisme, prométhéisme, scepticisme, lois physiques et naturelles...) ;
- concepts de SF ridicules ou puérils (e.g. les hommes-papillons de Alshain IV en symbiose avec des lépidoptères pour pouvoir voler...) ;
- intentions externalistes prenant le pas sur les logiques internalistes, avec pour corollaire une artificialité des enjeux ;
- construction narrative reposant sur, non plus des ficelles grossières, mais carrément des câbles d’amarrage, entre les twists, le tape-à-l’œil, la branchouillardise, et le constant gâchis de nombreux potentiels thématiques ;
- ruptures de continuité et de chronologie envers de Star Trek historique (1964-2005), suggérant une autre timeline ou un autre univers (comme dans chaque déclinaison depuis 2009) ;
- incessantes confusions entre les responsabilités civiles de l’UFP et les fonctions militaires de Starfleet ;
- transposition des névroses et placage des vogues d’aujourd’hui (comme le wokisme) sur une société utopique futuriste supposée les avoir depuis longtemps dépassées (cela a pour conséquences de faire perdre à Star Trek sa force, sa pertinence et son identité, tout en l’affligeant d’une date de péremption) ;
- "contemporanisation" perpétuelle des références, des structures et du langage, avec des anachronismes à la pelle ;
- worldbuilding aussi fragile qu’un château de cartes ;
- micro-univers de bac-à-sable ;
- bullshits, nawaks et WTF à gogo (e.g. les Alshains qui tirent partout sauf sur leurs cibles en fuite même après réactivation des satellites de compensation géomagnétique suite à l’inversion des pôles de leur planète, l’incapacité de l’USS Discovery à détecter un gigantesque champ de débris et de méthane gelé, Burnham qui pas à un seul instant ne songe à simplement stabiliser et faire dévier la course de la station Beta 6 au moyen d’un rayon tracteur, etc.) ;
- anti-trekkisme philosophique et idéologique ;
- fond oscillant entre la moraline de la doxa et le néant, avec zéro problématique, pour une histoire qui n’apporte rien, n’enseigne rien, ne dit rien ;
- incapacité à dépasser le stade anal du facteur divertissement kikoolol avec zéro esprit critique, l’addiction à l’entertainment par refus de penser et par refus de grandir ;
- dérives éthiquement douteuses voire nauséabondes ;
- triche diégétique (règles du jeu qui changent en cours du route) ;
- cuistrerie des dialogues pseudo-profonds ou faussement dialectiques ;
- humour "fun" de buddy movie et blaguounettes vaseuses dans les moments les plus périlleux ou tragiques (au secours !) ;
- running gags idiots ou démagos (e.g. le chat Grudge sur-exploité comme dans les mèmes des réseaux sociaux, les retours automatiques du vaisseau de Cleveland vers l’USS Discovery où qu’il soit dans la galaxie, etc.) ;
- autosatisfaction et narcissisme permanent de Michael Burnham, en passe de devenir le personnage le plus antipathique et puant de la série (or comme la qualité d’une série Star Trek se mesure généralement à celle de son·sa capitaine...) ;
- nombrilisme et autocentrisme des personnages dont les interactions forment le tissus même de la "réalité" ;
- entre-soi connivent des VIP hors-sol au point d’en devenir très excluant pour les spectateurs ;
- idiocratie du 32ème siècle pour mieux glorifier les héros du 23ème ;
- recyclage du complexe du martyr des trois saisons précédentes, avec une Mary Sue ayant le monopole exclusif des idéaux trekkiens seule face à une Starfleet indigne, cynique voire criminelle ;
- sempiternel refrain conformiste de la rébellion des protagonistes contre leur société dystopique, renversant du coup complètement le postulat de Star Trek dont la véritable héroïne collective est l’utopique Fédération tandis que les personnages en sont les représentants (et non les exceptions) ;
- grandiloquence et surenchère perpétuelle avec une menace globale sortie du chapeau et dont le spectateur se fiche pas mal (car ce n’est que le prétexte d’une énième montée dramatique et d’un fil rouge factice qui sera (mal) solutionné à la fin de la saison comme à chaque fois) ;
- retour-de-la-mort-qui-tue mais cette fois d’envergure galactique et que bien sûr seule la divine-ominisciente-messianique Michael Burnham venue du lointain passé pourra vaincre et éradiquer ;
- résolutions de toutes les intrigues – aussi bien à l’échelle des saisons que parfois même des épisodes (et ici ça commence fort dès le premier !) – au moyen de deus ex machina providentiels plus ou moins omniscients ou omnipotents (Mary Sue le plus souvent mais pas seulement...) ;
- montagnes opératiques qui accouchent de souris risibles (faut-il rappeler que dans la troisième saison, la Fédération et Starfleet avaient quasiment été anéanties car un Kelpien pleurait quelque part dans la galaxie ?) ;
- médiocrité d’interprétation du niveau des Télétubbies à base de hochements de tête, de clins d’œil à contremploi, de grands sourires sortis de clips publicitaires, de grimaces pas drôles, de câlineries et de mamours faisant pitié, etc. ;
- surjeu mélodramatique général, et surtout de la super-héroïque Mary Sue ;
- ethos et logos gloutonnés par un pathos sirupeux favorisant les manipulations émotionnelles ;
- guimauve tellement saturée de saccharine et autre sucres que c’est à en choper le diabète ;
- teen-soap larmoyant de telenovelas ;
- real Star Trek (1964-2005) empaillé par les clichés, la somme des idées reçues, le fan-service pour appâter les plus naïfs, le name dropping et les Easter eggs ad nauseam (e.g. "l’hommage" à Jonathan Archer immédiatement détourné de sa vocation exploratrice/fondatrice originelle, l’USS Voyager J et son "pathway drive prototype", le parallèle entre Deep Space 9 et la station de réparation Beta Six avec à bord un Lurian tout aussi mutique que Morn, la présidente Rillak faisant la "synthèse" de ST DS9 en étant une métis Bajorane et Cardassienne, Michael Burnham abordant le test du Kobayashi Maru – comme si rien n’avait changé en presque mille ans – avec le même état d’esprit "no lose" que Kirk dans ST II The Wrath Of Khan, etc.) ;
- auto-cannibalisation zombifiante du #FakeTrek post-2005 où les mêmes scènes, les mêmes schémas, les mêmes formules, et les mêmes dynamiques passent au shaker pour produire une bouillie infâme (e.g. destruction des planètes comme dans ST 2009, fuite dans les bois et sauts de falaise comme dans ST Into Darkness, quiproquos diplomatiques infantiles par impréparation ou incompétence comme dans ST Beyond, courses-poursuites Jackass comme dans Prodigy, Book qui perd sa planète Kwejian comme Spock avait perdu Vulcain dans ST 2009...) ;
- pompage éhonté (mais non crédité) de la culture pop (e.g. Alshain IV qui est une Pandora wannabe avec les mêmes rochers suspendus que dans Avatar de James Cameron...) ;
- BO de Jeff Russo étouffante, envahissante et corruptrice ;
- uniformes de cosplay renvoyant à une fan production ;
- scènes ne s’expliquant que par la frime et le show off (e.g. les nombreuses métamorphoses totalement vaines du vaisseau de Book, les morceaux d’aéronefs découplés juste parce que ça en jette...)
- séquences action sortant des jeux vidéo de type runners et shoot ’em up ;
- (...)
Bref, tout un programme de festival... ou de parade.
Et un parfait condensé du #FakeTrek de Kurtzman, fidèle à son équation légendaire : « Vous croyiez avoir atteint le fond du gouffre ? Eh bien non, il est toujours possible de tomber plus bas encore ! »
Ils s’y sont quand même mis à trois pour pondre ça, preuve que le ridicule ne tue plus...
Cerise sur la pièce montée : les effets spéciaux ultra-friqués de Discovery 04x01 Kobayashi Maru réussissent le tour de force d’être parfois moins réalistes encore que les maquettes fauchées des fifties ! Par exemple au timecode 8’35, les satellites (pourtant tous de taille identique) sis derrière Alshain IV occupent à peine moins de surface d’écran que ceux situés devant, ce qui réduit cette planète à une baudruche de quelques centaines de mètres de diamètre !
Faisant délibérément contraste avec mes décryptages exhaustifs dépassant parfois les 100 000 signes, cette non-critique (ma moins longue publication à ce jour) sera encore la meilleure réponse possible à cette quatrième (douzième) année d’imposture.
Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité