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Ne m'oublie pas
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Critique
Par Frank Mikanowski

Rhaaaaaaa Lovely, bon dieu que cela fait du bien de voir un bon épisode de Star Trek. Quand les scénaristes ne se prennent pas les pieds dans le tapis de leur histoire, quand Michael Burham est présente mais pas omniprésente, quand l’histoire a du cœur sans être excessivement larmoyante, quand tous les interprètes, et pas seulement les principaux, ont des belles choses à jouer... Bref j’ai surkiffé cet épisode

D’abord, c’est une histoire qui se concentre sur les personnages et donc qui n’essaye pas, par des scènes d’esbrouffe comme souvent dans la série, de nous montrer à tout prix le vaisseau sauver l’univers. Il y a donc du temps d’antenne pour se concentrer sur la psychologie des seconds couteaux de la passerelle et particulièrement s’occuper du cas du Lieutenant Keyla Detmer.

Gros ouf de soulagement quand même, on aurait pu penser que les scénaristes nous préparaient les épisodes précédents à nous refaire le coup d’Airiam. Mais non, il s’agit bien là d’étudier l’impact psychologique de ce saut dans le futur et les difficultés d’un équipage à exprimer et donc à surmonter le trauma d’avoir tout perdu. Et dans ce cas, c’est assez intelligent d’avoir éloigné Michael qui est dans une problématique différente du reste de l’équipe. Petit bémol pour les changements de comportement beaucoup trop rapides de certains. Je ne suis pas franchement sûr qu’un Stamets, dans la vie réelle, puisse passer des réflexions d’un gros con aux excuses de repentance aussi vite.

Il s’agit aussi cette semaine de traiter le cas d’Adira, humain-e liée à un symbiote. Second bémol à cette partie de l’épisode, les considérations du peuple Trill rappellent immédiatement des problématiques très terriennes et surtout très américaines que je pourrais résumer comme suit : Conservateurs Vs Progressistes. Ok, ce n’est pas la partie la plus fine de l’histoire.

Pour autant, je trouve que tout ce qui entoure le personnage d’Adira est plutôt finement trouvé. Même si la production de Discovery avait fait grande publicité du recrutement d’interprètes non binaire (Blu del Barrio) et transgenre (Ian Alexander), je trouve que les scénaristes ont l’intelligence de nous faire découvrir ces deux nouveaux personnages d’une manière assez naturelle, sans pour autant convoquer tambours et trompettes. Ca fait plaisir de voir un peu de finesse dans une série qui en a souvent manqué.

Visuellement, Star Trek Discovery continue, saison après saison, à marquer des points. Décors, photographie, effets visuels, maquillages, c’est simplement superbe. Cela prouve que le niveau télévisuel continue de progresser d’année en année.

Bref, je ne cache pas mon plaisir cette semaine !

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité

Analyse
Par Yves Raducka

Discovery 03x04 Forget Me Not est le prototype d’épisode exclusivement subjectif, dans sa construction même et dans sa vocation.
Serait-ce l’aboutissement "créatif" de cette équipe d’auteurs, son horizon indépassable ?
Toujours est-il qu’une analyse rationnelle et factuelle n’aura que peu de prise sur ceux qui seront emportés par cette/leur subjectivité.
Pour être objectivable, un tel opus postulerait d’une part un grand talent littéraire chez les auteurs (une affaire de finesse d’écriture), et d’autre part une empathie voire un amour des spectateurs pour les personnages de la série (une question de sociabilité naturelle certes, mais aussi et surtout d’épaisseur de caractérisation sur le temps long).
Si les deux conditions sont réunies, l’épisode pourra subjectivement s’apparenter à un chef d’œuvre par la grâce d’une connivence auteurs-spectateurs.
Mais si aucune des deux conditions ne sont réunies, il sera fatalement perçu comme un navet irregardable par tous ceux qui auront été exclus de ladite connivence.
Autant dire que la division, le clivage, et l’écart-type des réactions atteindront fatalement ici leur paroxysme – les avis se réduisant en pareille situation à leur composante la plus primale, la plus irrationnelle (à l’instar de l’épisode lui-même) : "j’adore" versus "je déteste".
Ce "piège subjectif" est finalement susceptible d’en révéler autant sur les auteurs que sur les spectateurs...
Malgré tout, efforçons-nous de privilégier l’analyse sur la psychanalyse...

En dépit de leurs invraisemblances systématiques pour ne pas dire systémiques, les épisodes précédents de Discovery parvenaient malgré tout à proposer des narrations qui ne se réduisaient pas à un ticket de métro. Pour preuve, il était possible d’en résumer sans omission le contenu – quand bien même hautement bancal – en plus de trois ou quatre phrases. Mais Discovery 03x04 Forget Me Not "innove" (en quelque sorte) en proposant un épisode d’une indigence encore inédite. Et si le spectateur réussit tout de même à le visionner jusqu’au bout sans s’endormir une demi-douzaine de fois (pas gagné), il en sera quitte pour une expérience "fascinante" : avoir réussi à contempler durant 55 minutes le vide intersidéral, pour beaucoup moins cher qu’un billet de tourisme spatial vendu par SpaceX, Virgin Galactic, ou Blue Origin.

En un battement de spore drive, l’USS Discovery se matérialise en orbite de la planète Trill, afin de permettre à l’humaine Adira de retrouver la mémoire collective de son symbiote. Surmontant les résistances rétrogrades des dignitaires Trill (coupés de la Fédération depuis belle lurette et refusant qu’un non-Trill puisse accomplir une symbiose), puis réussissant à pénétrer par effraction (avec l’aide du gardien Xi) dans les grottes de Mak’ala (environnement naturel des symbiotes évoluant un milieu liquide), grâce à un rituel monitoré par l’indispensable Mary-Sue, Adira entrera virtuellement en contact avec les six précédents hôtes de Tal…. en particulier avec feu son boyfriend trill Gray (interprété par l’acteur transgenre Ian Alexander) décédé accidentellement sur un vaisseau générationnel (qui recherchait lui aussi la Fédération), et aussi avec l’amiral trill Senna (qui livrera un algorithme permettant de localiser Starfleet). Pendant ce temps-là sur le vaisseau, avec l’assistance complice des bases de données sentient de la Sphère rouge, Saru s’emploiera à consolider les liens de famille de son équipage (dîner solennel, projection ciné…) jusqu’à ce que tous finissent par tomber dans les bras les uns des autres.
Voilà donc à quoi tient la proposition de la semaine.

Il est évident qu’avec Discovery 03x04 Forget Me Not, un épisode qu’il serait généreux de qualifier de "filler", l’intention des showrunners a été de faire du Star Trek, du moins de tenter d’en faire, davantage que d’habitude. Tournant le dos aux habituels lens flare et effets pyrotechniques abramsiens, une place centrale semble avoir été accordée aux dialogues, aux introspections, aux émotions, à la contemplation, à la méditation même. Le rythme s’est ralenti, la narration s’est posée, le mouvement incessant semble s’être soudain trouvé une respiration, une gravité. Les personnages semblent davantage mis à l’honneur, et surtout leurs interactions, leurs douleurs, pour mieux se retrouver eux-mêmes et donner l’impression de composer ensemble une famille, un collectif interdépendant et harmonieux, mais aussi une place dans ce 32ème siècle si étranger.
D’ailleurs, pour "preuve", on retrouve même en début d’épisode l’enregistrement d’un traditionnel journal de bord (non par le captain’s log du capitaine Saru, mais le medical log par le Dr Culber).
Formulé ainsi, on aurait envie d’y croire. Avec une bonne dose d’autosuggestion.
Car tout cela… c’est dans l’intention théorique des auteurs. Ou plus exactement dans ce qu’ils tentent de faire passer pour une intention…
Rien que ce log initial donne le ton : peut-être que cet appel au conditionnement pavlovien suffira à convaincre certains trekkers qu’ils seraient bien revenus au bercail, mais le contenu de ce gimmick est pourtant en essence fort différent. Il ne s’agit pas d’un rapport militaire objectivant, mais d’une confession intime misérabiliste débordant de subjectivité... et de pathos... exacerbé par une BO mélodramatique assez ampoulée.
Autant dire que la concrétisation est bien loin, pas même à l’état de potentialité.
Et de toute façon l’intention (sincère ou tartuffe) ne suffit pas, surtout lorsqu’on ne dispose aucunement des moyens (ou des compétences) de sa politique. Auquel cas, au lieu de se matérialiser et de prendre vie ou forme, l’intention se flétrit, se vicie, et il ne subsiste qu’un prétexte, un artifice, une illusion, et même une manipulation. Une de plus.
Parce que ces 55 minutes ne comportent strictement aucun sujet, aucun propos, aucun contenu, aucun fond. Juste des interactions – pour le seul "bénéfice" de l’interaction – entre des personnages plus ectoplasmiques que jamais. Ils se font tous des câlins, des mamours, et se disent à quel point ils s’aiment. Ce n’est même plus du mélo Burnham-centré, c’est désormais de la guimauve généralisée, façon Télétubbies ! Quasi-irregardable au-delà d’un âge de raison.

Et alors les dialogues… les dialogues… OMG ! Proprement inexistants ou onomatopéiques, au "mieux" d’une pauvreté abyssale ! N’importe quel collégien aurait pondu "moins pire".
Pour qui a été nourri des répliques stratosphériques d’un Ronald D Moore (ou d’un Michel Audiard), Discovery 03x04 Forget Me Not est un CALVAIRE à suivre.

Saru ne sait pas comment réduire le stress et faire plaisir à son équipage. Alors voilà qu’au travers de l’ordinateur de bord de l’USS Discovery, l’archive sentient (IA) de la Sphere rouge s’incruste… pour jouer les conseillers-psychothérapeutes de bord. Mais n’est pas Deanna Troi qui veut. L’IA lui suggère successivement les deux idées du siècle : organiser un bon gueuleton… puis projeter un vieux film muet en noir et blanc (Buster Keaton) dans le hangar à navette (en version holo of course)... devant les fous rires totalement excessifs et forcés (donc pré-enregistrés comme dans les sitcoms ou alors franchement immatures) de l’équipage !
Après s’être exécuté et ainsi unifié l’équipage, en présence du Dr Culber faisant office le récipiendaire d’un bilan psychologique (comme en réponse à son propre medical log d’ouverture), Saru s’émerveille – la larme à l’œil et un trémolo dans la voix – de la bonté, de l’empathie et de l’intelligence de la Sphère qui veille avec tant de munificence au bien-être de l’équipage !
De quoi vraiment émouvoir le spectateur. La relation Sphère/équipage est donc poétiquement analogique de la relation symbiotique larger than life des Trills. Et heureusement que, forte de ses millénaires de savoir galactique accumulé, l’IA fut là pour donner des idées aussi révolutionnaires que géniales à Saru : une soirée resto-ciné pour fédérer le groupe ! Puissant ! Ouaip, c’est sûr, nul personnel à bord n’aurait pu avoir une pareille inspiration ni concevoir une telle évidence, pas même les officiers supérieurs sortis de Starfleet Academy, pas même le Dr Culber après dix ans d’école de médecine.
Nous sommes bien dans ST Idiocracy. Et désormais à double titre. Le crétinisme général du 32ème siècle semble contaminer aussi les voyageurs du 23ème siècle rebooté.

La scène du repas organisé par Saru à bord de l’USS Discovery est emblématique de l’impéritie générale d’écriture. Elle arrive comme un cheveu sur la soupe, ne révèle rien, n’enrichit personne, ne rapproche aucun invité, ne scelle aucune communion.
Les dialogues sont insignifiants et même inexistants. Les déjeuners de famille les plus triviaux du monde réel les dimanches de pluie parviennent à être plus enrichissants et moins ennuyeux que ça.
La grande proclamation liminaire de Saru sur l’universalité culturelle des "rituels de rassemblement" se vautre dans un misérable "aye" général ("à vos ordres" en somme) supposé être le pacte fondateur de cette aventure au 32ème siècle ! La montagne accouche de la souris. C’est comme de prendre un grand élan... pour finalement n’aller nulle part (voire même reculer). En même temps, il faut dire que la (dis)continuité narrative n’aide pas étant donné que rien dans DIS 02x14 Such Sweet Sorrow Part 2 ne justifiait en internaliste cette équipée temporelle.
Durant ce banquet, les réactions – tantôt stérilement apathiques tantôt gratuitement hystériques – sont systématiquement aberrantes, d’une perspective psychologique humaine et a fortiori professionnelle au sein de Starfleet... notamment lorsque tous les commensaux se lèvent de table sous l’effet d’une vague de colère aussi contagieuse que nonsensique.
Le jeu des haïkus témoigne d’une incompréhension absolue de cet art poétique évanescent nippon, mais il n’est ici qu’un pauvre prétexte téléphoné pour faire péter un câble à Detmer...
Tandis que Mirror-Georgiou est cantonné à n’être qu’un pathétique comic relief par des répliques stériles à contremploi (genre "rappelez-vous que je-suis-la-méchante-de-cartoon-pour-rire"), telle une parodie sans panache des provocs de Trump.

On sort de nulle part (i.e. sans raison convaincante en in-universe) des tensions voire des micro-antagonismes entre les membres d’équipage (Detmer vs. Stamets, Saru vs. Tilly, Stamets vs. Tilly, Detmer vs. Culber…) uniquement dans le but de les résoudre dans les minutes qui suivent ou à la fin de l’épisode au moyen de quelques truismes, afin d’emphatiser avec grandiloquence des réconciliations et des déclarations d’amour mutuelles d’un pathos sirupeux.
La prétendue-rivalité de pilotage entre Stamets et Detmer (le premier aurait toute la gloire par l’indispensable propulsion mycologique lorsque la seconde s’inflige le pilotage ingrat du quotidien et son lot de crashs) convoque les pauvres clichés obsolètes de la "culture aéro" du milieu du 20ème siècle : le machisme rampant débordant de testostérone et les concours de phallus néandertaliens. Quand bien même attaché à une profession mythique (pilote, de l’aveu explicite de Detmer au Dr Culber), ce préjugé sexiste ne gagne pas à être perpétué ainsi par-delà le genre au risque de frapper d’inanité la finalité même du progressisme pour n’en garder qu’une vaine posture. Cette initiative (ou cette gaffe ?) contredit grossièrement la vocation démonstrativement inclusive et intersectionnelle de la série, tout en s’enfonçant davantage dans l’anachronisme.

L’épisode assume cette fois la "cyber-altération" (suggérée par le second épisode de la saison 3 mais curieusement invisible dans le troisième) de l’humaine augmentée Keyla Detmer : est-ce un trauma résultant du voyage temporel ou bien une redite de la "possession" d’Airiam ?
Toutefois, si cela confère une excuse (i.e. influence endogène ou exogène) à ses aléas psychologiques (inquiétants d’ailleurs via ses haïkus sanglants), cela ne fait que souligner davantage les gratuites irrationalités comportementales des autres personnages (qui eux n’ont pas de semblables "alibis").

L’ensemble de la séquence sur la planète Trill cherche putassièrement à faire pleurer Margot, mais c’est pour l’essentiel un WTF embrouillé qui ne respecte quasiment rien – quand bien même modulo 800 ans – de ce qu’avait établi ST TNG et ST DS9 sur cette culture, pourtant exhaustivement explorée à l’ère bermanienne.

Avant toute chose, on appréciera cette si flatteuse marque d’inclusion woke revue et corrigée par une vulgarité toute trumpienne : pendant la première moitié de l’épisode, Adira et l’équipage se complairont ostentatoirement à qualifier Tal, le symbiote Trill, de "calamar (squid en VO) dans le bide" ! Tellement trekkien. Un exemple parmi tant d’autres du slang english contemporo-centrée de DIS...

Les dignitaires de la planète Trill annoncent d’abord que les symbiotes ont été détruits par le Burn et que depuis, il n’y a plus de Trill en symbiose ! Euh, mais quel rapport ?! Et si tel était vraiment le cas, Burnham ne devrait-elle pas s’en étonner et s’y intéresser de près (dans le cadre de son enquête intersidérale sur les causes du Burn) ?
Pourtant, la suite de l’épisode nous révèle de nombreux symbiotes dans les Caves Of Mak’ala (exactement comme au 24ème siècle). Les épisodes de DIS ne sont-ils même pas capables d’être cohérents envers eux-mêmes ?

Ensuite, il apparaît qu’en raison du Burn (décidément, c’est l’acte fondateur du Kurtzverse), il n’y a quasiment plus de Trills compatibles avec la symbiose (ou "join"). Là encore, quel rapport ? Ils étaient tous sur des vaisseaux de Starfleet au moment du Burn ?! Serait-ce d’ailleurs cohérent pour une société que l’épisode présente comme n’appartenant pas à Starfleet ?
Mais pire, l’épisode ST DS9 03x04 Equilibrium avait révélé que la moitié des Trills sont compatibles avec le "join". C’était une information classifiée au 24ème siècle, mais face à la situation d’extinction que prétend mettre en scène cet épisode, il serait difficile de croire que cette omerta serait toujours en vigueur. Et quand bien même, les interlocuteurs de Burnham sont ici les dirigeants de Trill, ils ne peuvent ignorer cette réalité… que pourtant ils contredisent par leur voracité à rencontrer celui (ou celle) qu’ils croient être un(e) Trill compatible, puisque pourvu(e) d’un symbiote.

Les autorités prétendent ensuite qu’en 2 000 ans, jamais aucun "join" n’a été possible sur un(e) non-Trill. Ce qui est faux, car il y a au moins eu l’humain Riker avec le symbiote Odan dans ST TNG 04x23 The Host (et moyennant un complet partage mémoriel contrairement à Adira et Tal).
Pire, la posture des "élites" de Trill se révèle très vite moins scientifique que doctrinaire. Ce n’est donc pas tant les limites d’un join inter-espèce qu’elles soulignent (par exemple Riker qui n’aurait pu survivre très longtemps avec Odan en lui) que la transgression quasi-religieuse à leurs yeux du procédé, impliquant donc un volet xénophobe. C’est, là encore, assez éloigné de l’ouverture d’esprit des Trills dans le ST historique, toujours plus pragmatiques que dogmatiques – la proscription de la "reassociation" (Lenara Kahn), les sélections de la Symbiosis Commission (Verad) et dans une moindre mesure la mise en quarantaine des assassins (Joran) n’étant pas des signes rétrogrades d’obscurantisme mais au contraire des tabous structurants.
Mais qu’importe puisque cela permet à des scénaristes aux très petits pieds de convier les clichés les plus éculés sur l’opposition entre la tradition et le progressisme (les républicains versus les démocrates US ?).
Pis, la transposition est ici portée par des dialogues tellement misérables que cela tient d’une parodie enfantine. Et l’ensemble de la problématique arrive vraiment à contresens étant donné que l’épisode la lie à l’effondrement prochain de la société Trill ! Ce qui confère un caractère d’autant plus hors sol à ces "élites" de Trills (vénérant des principes stériles dans un monde en perdition) mais sans pour autant expliquer le lien improbable entre l’absence de "join" et la mort de toute la société Trill...

Dans le dos des autorités rétrogrades, Mary-Sue entraine Adira dans les grottes de Mak’ala, le gardien Xi guide cette dernière pour qu’elle se reconnecte à son "moi intérieur", Tal. Une Mynh’ta Orb est chargée de monitorer la Trill isoboramine du sujet lorsqu’il se plonge dans les symbiot pools. Mais c’est là un saut dans l’inconnu puisque Adira n’est pas Trill. Cet Orb n’a jamais été entrevu sur Trill au 24ème siècle, sa présence peut facilement s’expliquer par l’écart temporel de 800 ans, mais il est curieux qu’il ressemble aux nombreux orbes bajorans (aucun rapport internaliste possible) qui émaillent la série ST DS9...

Les autorités surprennent au bout du compte les protagonistes à Mak’ala, mais après quelques supplications, ils acceptent benoîtement que l’expérience se poursuive. De nombreux Trills sont donc présents in situ, et comme ce sont des experts de la question (rien de moins que les hiérarques officiels), ils étaient bien les mieux placés que quiconque pour guider Adira, quand bien même humaine...
Eh bien non. Michael Burnham ne connait pourtant rien à la symbiose trill (elle n’en avait même jamais entendu parler quelques heures avant), mais bien entendu, c’est elle qui s’y colle. Et directement avec la maestria d’une experte, s’il vous plait ! Elle plonge donc à son tour dans les bains de "liquide amniotique", là où Adira a disparu. Où cette dernière est-elle passée d’ailleurs ? A-t-elle coulé dans un gouffre sans fond ? S’est-elle dématérialisée sans explication dans un monde meilleur ? Pas même les Trills ne semblent le savoir. Mais qu’importe, Mary-Sue la trouve aussitôt, dans ce monde-là où dans un autre.
Gageons que Mary-Sue marche simplement sur l’eau et que sans même disposer du pouvoir de télépathie, elle a rejoint l’esprit d’Adira en temps polynomial (quelques secondes avant sa suffocation hypoxémique) pour la sauver et la guider dans son voyage spirituel, tel l’ange gardien rouge ou l’archange Michel qu’elle a toujours été. Dès lors tout se passe pour le mieux...
Normal. Burnham a pris les choses en main.

Adira retrouve ses souvenirs personnels et reçoit en même temps ceux de son hôte Tal. S’ensuivent de nombreux flash-back des jours de bonheur qu’Adira coulait sur un vaisseau spatial générationnel avec Gray, son "boyfriend" (sic) Trill ayant fait le "join" avec le symbiote Tal. L’une fabriquait un violon tandis que l’autre en jouait (un instrument de circonstance).
Ça valait bien la peine d’inviter des acteurs•rices non-binaire et transgenre en grande pompe médiatique dans la série pour leur faire jouer un couple étatsunien standard (girlfriend & boyfriend) renforçant le stéréotypes binaires/cisgenres. Car les scénaristes continuent à pesamment genrer Adira en utilisant systématiquement les pronoms personnels "she" et "her" (en VO) à son sujet. Et jusqu’à maintenant rien dans le script – donc rien en in-universe – ne suggère que les personnages Adira et Gray seraient respectivement non-binaire et transgenre (comme le sont pourtant leurs interprètes)...
Ce qui est un peu ballot quand même, laissant une vague impression de gâchis token. "Tout ça pour ça ?" – une formule qui pourrait d’ailleurs être l’épitaphe de toutes les séries d’Alex Kurtzman.

Et voilà que survint la tragédie détectable à deux épisodes d’avance : un accident frappe de plein fouet Gray. En mourant, ce dernier convainc Adira – quoique humaine – d’accepter un "join" avec Tal pour préserver la mémoire. Visiblement, ce sont les robots-médecins de bord automatisés qui se chargent de l’opération : un succès (mais sans les souvenirs).
Finalement, les six hôtes précédents de Tal défilent dans cette grande assemblée spirituelle (avec Jovae, Mandela, Cara, Senna et Gray) qui lorgnerait presque vers A Matter Of Life And Death de Michael Powell et Emeric Pressburger (1946). Adira est désormais admise dans ce cercle, elle peut même prononcer son nom complet (que le dernier ferme la porte), et c’est la première humaine à avoir ce privilège.
Et fuck ST TNG. Et puis c’est pas comme s’il n’y avait pas eu 800 ans d’Histoire ensuite...

Heureusement que Mary-Sue était présente pour assister à ce concentré en tube (ou en barre) d’émotion déchirante. Mais surtout pour permettre ce processus, cosmiquement primordiale qu’elle est. Omnisciente et omnipotente comme il se doit, telle une Q, elle savait exactement ce qu’Adira devait faire pour rétablir le contact métempsychotique. Elle savait également s’il y avait encore des souvenirs à exhumer ou non, quand persévérer (au lieu d’abandonner) et quand partir. Peut-être est-ce d’ailleurs à la divine Burnham que cet environnement spirituel incluait une composante "réalité augmentée" bien pratique, avec la perception en filigrane de la piscine symbiotique de sa sortie à la verticale.
À moins qu’il ne s’agisse pas d’un "environnement spiritique" où le temps ne s’écoulerait pas à la même vitesse, mais d’un monde purement magique (TGCM) qui permet de respirer dans les cuves amniotiques laiteuses de Mak’ala ou bien d’y barboter tout en étant physiquement (et pas seulement mentalement) ailleurs...

De toute façon, il ne faut surtout pas trop se poser de questions. Vestiaire pour le cerveau et masturbation émotionnelle collective obligatoire...
- Donc cet étonnant vaisseau générationnel en quête de Fédération où vivaient Adira et Gray, c’était pourtant une bien belle idée de SF (quoique convoquant quelque peu BSG). D’où venait-il ? Qu’est-il devenu ? Pourquoi Adira l’a quitté ? Comme s’est-elle retrouvée sur Terre ? Bah ! On s’en fiche vu que le "potentiel en pathos" de tout ça frise le zéro absolu.
- Quelle était la vraie relation de l’amiral Senna avec Starfleet ? Pourquoi et comment est-il mort ? Dans quelle condition Gray a-t-il hérité de son symbiote Tal ? Était-ce le fruit d’un accident (comme Ezri) ou était-ce un "legs" prédéterminé et assorti d’une sélection/formation comme au 24ème siècle (Gray semblait aussi heureux d’accueillir en son sein Tal qu’en d’autre temps Jadzia l’était pour Dax) ? Allez, on s’en moque, car Senna Tal était juste un MacGuffin comme Bruce Maddox dans la série Picard. Sa seule utilité aura été de délivrer un algorithme, et finalement des coordonnées spatiales pour que la "chasse au trésor" galactique puisse continuer de plus belle au prochain numéro. Telle est la norme lorsque les personnages ne sont que des ombres ou des alibis.
- Et comment se fait-il que la réussite de la symbiose entre Adira et Tal, indignant tous les officiels Trill au départ, suscite soudain leur extase à la fin de l’épisode (c’est-à-dire quelques minutes après en internaliste) ? Au point même que la déchéance de toute la société Trill semble soudain ajournée ! On s’en fout également, ce sont des questions aimablement dédiées par CBS aux spectateurs qui ne sont pas les bienvenus (et qui sont priés d’aller voir ailleurs).
- Et comment Adira a-t-elle pu définitivement achever son "join" avec Tal, alors que ce ne fut pas possible sur l’Enterprise D au 24ème siècle ? Ben pareil, OSEF, d’autant plus que dans cette timeline, Riker et Odan ne se sont jamais visiblement rencontrés...
Tout ce qui compte finalement pour les besoins soapy-100%-garantie de la série, c’est qu’après le rituel de WTF de Mak’ala, Gray Tal rende visite – tel un gentil spectre – à Adira dans ses quartiers sur l’USS Discovery (au moment où elle tentait de se la jouer comme ST TNG 05x25 The Inner Light à la fin avec la berceuse de Senna). Un vrai concept – mignon tout plein – de fantasy entre The Ghost And Mrs Muir et Randall And Hopkirk (Deceased) qui sied en effet à une série "Star Trek" de pure fantasy dévidant des turbo-parcours initiatiques campbelliens tous les trois épisodes. À moins que Discovery n’ait l’intention de décliner dans une version shamallow la hantise de John Crichton "possédé" par Scorpius dans Farscape, ou encore de Gaius Baltar par Caprica Six dans BSG 2003 (dans tous les cas, rien de bien nouveau).
Et l’ensemble des contraintes réalistes, toutes les pesanteurs du "join" (ST DS9 03x04 Equilibrium), du Zhian’tara Ritual (ST DS9 03x25 Facets) ou du Rite of Emergence (ST DS9 07x13 Field Of Fire)… oubliées ! C’est en effet beaucoup plus simple ainsi, vive le 32ème siècle libératoire.

Ah mais il y a aussi une cerise sur la pièce montée…
Discovery 03x04 Forget Me Not révèle donc que la planète Trill n’a jamais appartenu à la Fédération ! Une initiative qui certes, pour une fois, n’entre pas frontalement en contradiction avec une quelconque ligne de dialogue du Star Trek historique. Pour autant le contraire était implicitement admis, étant donné le nombre d’officiers supérieurs de Starfleet qui étaient Trill au 24ème siècle.
Cependant, on comprend rapidement la raison de ce curieux parti pris quelque peu "retconant" : il fallait glorifier encore un peu plus Super-Mary-Sue. Car à la fin de l’épisode, suite à l’achèvement du "join" symbiotique de la première humaine, les hiérarques annoncent que désormais, Trill est prête à rejoindre l’UFP !
Ainsi donc, Michael Burnham aura réussi en quelques minutes les doigts dans le nez ce que la Fédération tout entière n’avait pas réussi à obtenir durant 900 ans (entre 2161 et le Burn du 31ème siècle) ! Et avec un bel handicap supplémentaire : à une époque où la Fédération n’existe plus vraiment et où l’USS Discovery ne peut rien garantir à personne ! Ça vous pose quand même une super-héroïne mythologique, ça.
Révélant aussi et surtout que, quelles que soient les faiblesses structurelles de la série Andromeda (petit budget, interprètes monolithiques, scripts avalés…), elle réussissait quand même à être incomparablement plus réaliste dans son déroulé narratif que la saison 3 de Disco. Car Dylan Hunt ne parvenait pas restaurer le Commonwealth aussi vite, aussi aisément, et aussi messianiquement.
Une bien belle leçon de relativisme.

Notons tout de même que la boucle de continuité se referme subrepticement puisque l’archive sentient de la Sphère rouge révèle ici la même voix féminine (interprétée par Annabelle Wallis) et les mêmes goûts cinéphiles que l’lA Zora dans Short Treks 01x02 Calypso...

Bref

Enrober la prévisibilité, les poncifs, les lapalissades, l’impuissance d’écriture, les incohérences en flux tendu (aussi bien envers le Trekverse qu’envers soi-même), l’immaturité (ou l’irrationalité) psychologique, l’imbécilité généralisée in-universe, le néant sémantique... d’une couche aussi épaisse de pathos à la douce attention des "foules sentimentales", et même cette fois, pire encore, de tonnes de guimauve débagoulante se contemplant pompeusement le nombril... cela dépasse l’entendement. Le KurtzTrek bat ici son propre record émétique, tant il plus la moindre place pour l’éthos et le logos.
L’épisode prétend déménager dans le lointain futur pour s’émanciper du timeframe trekkien historique, mais le massacre internaliste de la franchise continue de plus belle.
L’épisode prétend célébrer la transcendance par une cause commune et supérieure ; mais il glorifie en fait seulement le narcissisme, l’égo, le moi, le "Je" de chaque personnage.
L’épisode prétend prodiguer de "l’émotion vraie", allant de l’amour au pardon ; mais il distribue en vérité de la pornographie émotionnelle ad nauseam.
L’épisode prétend délivrer de la sensibilité, de la profondeur, de l’humanisme ; mais il confond grossièrement cela avec le cabotinage, la posture, la niaiserie... et plus généralement les "bons sentiments" délivrés à la truelle.
L’épisode prétend être l’acte de baptême de la famille et de l’amitié ; mais il exhibe en réalité toute la facticité du pire de la téléréalité… où l’interaction relationnelle cesse d’être un moyen pour devenir sa propre fin.
La contreproductivité et la contrefaçon sont désormais à leur apex !
Allant ainsi de mal en pis, Discovery est donc progressivement passé du soap du soir (Dynasty, Santa Barbara, Amour, gloire et beauté...) au teen soap (The CW Network, Dawson…) pour finalement s’échouer dans la téléréalité (Loft Story...) ! En somme le niveau zéro, non plus du divertissement, mais de la diversion audiovisuel(le).
Quelqu’un se souvient-il que l’inhérence de Star Trek rimait avec retenue, sobriété, distanciation, maturité, lucidité, intelligence, sens, fond, idéalisme, exigence ?

- Sacrifier toute la vraisemblance du contexte et des structures (irrespect et incohérence absolue envers les Trills, zapping du vaisseau générationnel, exclusion de toute réflexion sur un quelconque sujet…) à la seule character interaction,
- utiliser des personnages dont la crédibilité d’existence tient à un papier à cigarette pour composer une Ingalls family entièrement virtuelle,
- et susciter mécaniquement une stimulation sex... euh émotionnelle chez le spectateur par le seul cumul de toutes les techniques manipulatoires disponibles (lenteur en guise de profondeur, larmes en guise de "viscéralité", surjeu en guise d’authenticité, cliché en guise de justesse, artificialité en guise de vérité, grandiloquence en guise de mesure, pathos en guise de pudeur, mièvrerie en guise de dramaturgie, musique emphatisante en guise d’expressivité)...
... c’est la définition même du cynisme audio-visuel, qui plus est poussé dans ses derniers retranchements.
Le cynisme de ne s’adresser qu’au cerveau paléomammalien (limbique) voire au cerveau reptilien, mais surtout pas au cerveau néomammalien (néocortex)... quand bien même la théorie triunique serait elle même un peu fossilisée.

Et en s’obstinant, épisodes après épisodes, à enraciner les acteurs•rices non-binaires et transgenres dans un paradigme relationnel binaire (cisgenre), tout en les associant à des personnages en prise avec la symbiose trill – substitut SF de la réincarnation – cela témoigne d’une forme de lâcheté derrière les puants autosatisfecits médiatiques de Secret Hideout. Soit un authentique syndrome de pinkwashing SJW avec un token maladroit qui dessert la cause LGBTQIA+. A fortiori lorsque l’on sait que les auteurs du Star Trek bermanien avaient eu la lucidité autocritique et l’honnêteté intellectuelle de reconnaître eux-mêmes les limites en audace de ST DS9 04x06 Rejoined… il y a déjà vingt-cinq ans !
Sauf que cet épisode aujourd’hui culte de DS9 étaient brillamment écrit et interprété, au point de transcender toutes les éventuelles frustrations. Rappelant qu’avant de chercher à s’ériger en SJW de pacotille, Kurtzman & co devraient d’abord commencer à écrire de bons scripts dépourvus de tous les clichés que la relation Adira-Gray alignent. Et c’est seulement ainsi qu’ils réussiraient à servir (et non desservir) l’inclusivité dont ils se prévalent.

Discovery 03x04 Forget Me Not se résume à une enveloppe de glu rose et visqueuse, poisseuse, ouatée de saccharine. Même l’amertume, même la douleur, même la souffrance, même la tragédie réussissent à devenir sucrées. Tel un supplice melliflu à l’entonnoir qui pénètre par tous les orifices jusqu’à ce que nausée puis diabète s’ensuive.
Cette expérience confirme, si cela était encore nécessaire, que les Kurtzodes ne sont jamais aussi mauvais et aussi insultants que lorsqu’ils ont la prétention de faire du Star Trek. Et au fond, c’est peut-être ça le plus démoralisant, au regard du label invoqué.
À l’ère de toutes les impostures, le Star Trek in name only ne pourra être marginalement "supportable" qu’en assumant franchement la rupture du cordon ombilical, c’est-à-dire en faisant ouvertement du Star Wars, du The Walking Dead, de la fantasy, du serial des forties… bref : tout sauf Star Trek. Car ainsi, en dépit de l’usurpation éhontée de label, la tromperie sur la marchandise n’en sera que moindre.
Mais rien de tel ici.
Et "rien" est bien le mot qui convient… moyennant une analyse critique moins longue qu’à l’accoutumée, car il n’est pas possible de faire du plein avec du vide. Sauf bien sûr à vouloir assurer le SAV des exécrables showrunners pour pas un rond.
Or cette fois, difficile de trouver un quelconque alibi de bienpensance pour accorder le 5/5 contractuel à un produit CBS aussi trendy. La "production value" friquée pour préserver le rideau de fumée ? La belle photographie cinémascope compensant une mise en scène lénifiante ? Le vertige devant le vide insondable ? Les images qui font briller les yeux, et surtout pleurer… de colère ou de désespoir ?
Même pas, juste l’indifférence.
Retour donc à la note plancher intégrale, si incorrecte socialement.

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité