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Q & A
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Critique
Par Frank Mikanowski

Et c’est parti pour une nouvelle série de courts métrages Trek, amuse bouche sensé combler l’absence de série à l’antenne de CBS All Access. Lancé lors de la Comic Con de New York, voici le premier épisode centré sur Spock et Number One coincé dans un ascenseur de l’Enterprise. L’action se situe au moment de l’arrivée de Spock sur le vaisseau. Alors juste enseigne, celui ci fait connaissance à cette occasion avec le premier officier de Pike.
Sur la seconde saison controversée de Discovery, il y avait pour moi une belle réussite et en même temps un regret. Si j’ai beaucoup aimé la proposition Anson Mount / Ethan Peck pour le duo Pike / Spock, j’attendais particulièrement de voir ce qui était prévu pour Rebecca Romijn (Number One). Et patatras, son rôle ressemblait plus à un cameo de luxe qu’à un vrai rôle développé. Et c’est bien dommage quand on voit l’alchimie palpable qui existe ici entre elle et Ethan Peck.
De là à dire que la production continue de tester le désir du public de voir une série Enterprise avec ces trois personnages, je pense qu’on peut raisonnement dire que c’est surement dans le viseur d’Alex Kurtzman, grand vizir des séries Trek. S’il n’y avait le probable saccage à nouveau de la continuité de la saga, je ne serais pas loin d’en avoir également envie.
Sur l’histoire présentée dans cet épisode, la situation ne sert qu’à initier une relation particulière entre Spock et Number One. Par le jeu des questions réponses, les personnages commencent à se jauger, à ce cerner. On y voit un Spock plus jeune que la version torturée de la seconde saison de Discovery. Celui ci laisse encore facilement s’exprimer sa moitié humaine. L’ensemble est agréable à regarder voire à entendre car les deux compères savent entonner la chansonnette, un grand classique des séries Trek.
Visuellement l’Enterprise a toujours le clinquant d’une production Abrams et j’ai toujours autant de problème avec la vue extérieur des turbolifts, aussi idiot que l’usine Budweiser sensé être la salle des machines de l’Enterprise des derniers films.
Pour autant, Q&A est un bon démarrage pour la nouvelle saison des Short Treks, sans enjeu mais diablement agréable.

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité

Analyse
Par Yves Raducka

Par la grâce d’un budget moindre et donc d’une économie de moyens, la mini-série Short Treks s’est progressivement définie tel un Discovery light – c’est-à-dire allégée en outrances, en mélodrames, en inconséquences, et en invraisemblances en tous genres. À la notable exception de l’exécrable 01x04 The Escape Artist, la place généralement accordée aux dialogues en tête à tête, aux huis clos, aux confessions intimes… confère à Short Treks un connoté moins grossièrement anti-trekkien, à défaut d’être tant soit peu trekkien.

Davantage qu’un véritable screening – ou galop d’essai – pour une hypothétique future série centrée sur l’équipage de Pike, Number One, et Spock, le minisode 02x01 Q&A vise surtout à rentabiliser les décors de l’USS Enterprise, hypocritement rebootée dans la saison 2 de Discovery, tout en capitalisant sur l’inattendu supplément de popularité de l’équipage de Pike par rapport à celui de Burnham.

Narrativement, l’objectif est aussi d’offrir une gâterie aux trekkers, à savoir le moment supposé culte du premier contact de Spock – un jeune Spock fraichement émoulu de Starfleet Academy – avec l’USS Enterprise du capitaine Pike et son équipage.
Dans l’ordre des apparences et peut-être aussi des intentions, l’engagement semble tenu, puisque l’épisode consiste en un balai quasi-ininterrompu de micro-dialogues dynamiques, Spock et Number One se renvoyant la balle avec une agilités flirtant presque avec les comédies légères voire les marivaudages de Billy Wilder ou de Woody Allen.
Beaucoup de Q&A (Questions & Answers) porteront sur les sciences (compétence commune des deux protagonistes), mais pour une fois davantage frappées au coin du réel qu’à l’habituel techno-bullshit discoverien (on évoquera ainsi pêle-mêle le nombre d’or, la théorie du chaos, l’échantillonnage quantique de bosons, l’astronomie stellaire…).

Et comme pour conférer à l’exercice un certificat d’authenticité, nombreux sont les clins d’œil appuyés au Canon, en particulier à l’épisode TOS 00x01 The Cage.
Derrière une fausse tension sexuelle (induite par la seule proximité physique dans le turbolift) entre Spock et Number One, cette dernière dévoile ses sentiments refoulés pour le capitaine Pike par le portrait à la fois idéalisé et frustré qu’elle en dresse, i.e. le plus ouvert des officiers aux points de vue des autres, mais hélas pour elle… dénué de tout romantisme… sauf au bénéfice des chevaux… (comme le montreront en effet les expériences de simulation mentale des Talosians).
La voix de l’ingénieure de bord (Upjohn) est ostentatoirement écossaise, à croire que ce poste clef de l’Enterprise est ethniquement profilé (ou prédestiné).
Finalement, la cohabitation forcée dans un espace réduit finit par ébranler les digues, et la très froide Number One s’abandonne soudain à l’opérette, en étonnant le célèbre I Am the Very Model of a Modern Major-General de Gilbert & Sullivan (probablement en hommage à TNG 05x05 Disaster dans la mesure où ST Insurrection avait plutôt fait honneur au non moins célèbre A British Tar du même duo de compositeurs)... jusqu’à entrainer Spock dans la farandole et lui arracher malgré lui un sourire à pleines dents (supposé renvoyer à celui - bien plus discret - de The Cage).
Cerise sur la pièce montée : ce minisode révèle (ou plus exactement confirme) que Number One se nomme en fait Una (difficile de déterminer toutefois s’il s’agit d’un prénom ou d’un nom de famille).
Autant dire qu’appréhendé ainsi, Short Treks 02x01 Q&A parait combiner à la fois les hésitations initiatiques d’une rencontre (01x01 Runaway), une touche de comédie musicale revisitant les classiques de Broadway (01x02 Calypso), et l’icônisme culte des "instants prequels" (01x03 The Brightest Star).

Malheureusement, nihil novi sub sole ! Le fond du propos relève d’un hit and miss pour finalement accoucher d’une (belle) illusion, tant le forcé le dispute au factice.

Rarement une panne d’ascenseur aura été aussi prétexte, et les équipes techniques aussi incompétentes hors d’une situation de crise. Outre un incompréhensible immobilisme des secours, le sauvetage se fera finalement par voie de varappe, de descente en rappel, et d’équilibrisme !
TOS 03x11 Day Of The Dove (sis en 2268) avait établi la dangerosité de la téléportation intra-vaisseau impliquant de la réserver aux situations d’urgence, et ce postulat fut bien respecté un siècle avant en 2153 par ENT 03x12 Chosen Realm. Mais la série d’Alex Kurtzman-qui-s’en-fout n’a quant à elle pas hésité à mettre en scène un intraship beaming pour un simple motif de confort dans l’épisode DIS 01x03 Context Is For The Kings. Dès lors, dans la timeline de Discovery à laquelle appartient Short Treks 02x01 Q&A, il n’y avait eu aucune contre-indication à employer ce recours pour épargner aux spectateurs un long moment de solitude. Mais comme dans toute la saison 2 de Discovery, les showrunners oublient manifestement les téléporteurs dans chaque situation où ceux-ci pourraient vraiment faire la différence, par exemple pour gagner du temps... ou sauver des vies. Toute la logique du kamoulox, quoi.
Un simple coup d’œil à TNG 05x05 Disaster permet de remettre les pendules de la vraisemblance à l’heure.

Il aura en outre fallu - à l’occasion de ce focus en vue externe sur un turbolift - que Short Treks 02x01 Q&A importe dans l’USS Enterprise l’improbable architecture (à la Maurits Cornelis Escher) des entrailles de l’USS Discovery : un crypto-cube borg cyberpunk en creux, dont le gigantisme pourrait avaler plusieurs Burj Khalifa, et rempli de vide (!!!) pour se payer un roller coaster d’enfer 100% arcade en métros suspendus. Wow ! Total what the fuck, absolument anti-fonctionnel et contre-productif ! Un tel espace perdu (luxe de flambleur ?) à l’intérieur de la superstructure n’a aucun sens dans la construction de navires spatiaux, l’USS Enterprise n’obéissant absolument pas à la vocation des sphères de Dyson (TNG 06x04 Relics), pas plus qu’elle n’est alimentée par une singularité ou une étoile. Le parti pris de Discovery (et de Short Treks) implique une faille de résistance et de robustesse majeure face aux considérables stress auxquels sont soumis les vaisseaux (notamment sur le terrain inertiel, lors des passages en distorsion, et dans les combats spatiaux).
Corollaire : non content d’être visuellement et cosmétiquement très différents du vaisseau de TOS (par exemple, la passerelle est ici encore plus over the top et tape-à-l’œil que dans les films Kelvin, les ascenseurs ont des planchers transparents comme des plateaux de studio télé, etc. - la liste serait longue), l’USS Enterprise discoverien se révèle désormais un vaisseau plus gigantesque même que l’USS Vengeance de ST Into Darkness, éloignant donc davantage à chaque épisode la timeline de Discovery de l’ombre de celle du Star Trek historique (et même désormais de celle de Kelvin).
Dans l’empire de la surenchère, il était fatal que le reboot assumé d’Abrams soit à son tour enfoncé par le reboot inassumé de Kurtzman. Au jeu de celui qui a la plus longue...
Encore que l’effet produit est celui du TARDIS, mais bien involontairement au contraire de Doctor Who (ou de l’épisode ENT 02x16 Future Tense). Car dans DIS, l’intérieur de l’USS Discovery - tout comme désormais celui de l’USS Enterprise - parait incomparablement plus vaste que l’extérieur ! Une possibilité qu’aucune technologie du 23ème siècle trekkien (ni même du 24ème) ne permet. Ce qui témoigne donc de toute évidence d’un sérieux problème d’échelle dans la composition des CGI, égarés quelque part entre l’obsession kurtzmanienne pour l’épate et un amateurisme qui ferait injure aux fan-productions. Ce qui est tout de même ballot pour une production au budget aussi pharaonique. Si les VFX/SFX subissent les mêmes outrages que les scenarii, il ne restera décidément plus grand chose à admirer dans Discovery...

Les dialogues entre Spock et Una font mine d’être étincelants car perpétuellement mobiles, inachevés et superposés dans un medley en creux, telle une FAQ aux questions incomplètes et aux réponses inexistantes.
Les alibis de l’ellipse ou de l’entre-soi (mention spéciale pour leur belle connivence quant au codage de l’OS de l’ordinateur quantique du vaisseau qui manquerait d’élégance !) ne font qu’exclure le spectateur de cette folie à deux.
Énumérer une liste de têtes de chapitres aux thèmes "ambitieux" (e.g. lorsque Spock demande tout de go et WTF si la Prime Directive n’est pas illogique et moralement indéfendable !?!) mais sans les alimenter d’un quelconque contenu s’apparente aux façades manipulatrices d’un décor en carton-pâte.

La séquence musicale (et chantée), quand bien même élégamment interprétée, survient comme un cheveu sur la soupe pour sceller à peu de frais un secret partagé (puis un serment pour rire) entre les deux personnages, soit l’alchimie du pauvre.
Pire, le caractérisation de ce jeune Spock, mitraillant sa supérieure hiérarchique (curieusement résignée à ce "rituel de passage" !) de questions savantes ou stériles (selon la perspective), bavard et incontinent tel un gamin dissipé en phase prépubère d’éveil (comme s’il était dépourvu de tout vécu et substance)... représente une absolue négation de l’essence du personnage historique, et plus généralement de la vulcanité. Le paradigme de cette culture extraterrestre du savoir, de l’équanimité, et de la logique a toujours postulé une économie de mots (jamais aucun Vulcain n’a parlé pour ne rien dire), a fortiori pour des individus d’âge adulte (quand bien même jeunes) et ayant accompli avec les honneurs le très sélectif cursus académique de Starfleet.
Du coup, Ethan Peck qui était parvenu à composer bon an mal an un Spock vaguement "convaincant" à travers le filtre de la "torture multidimensionnelle" infligée par la saison 2 de Discovery... livre au naturel dans Short Treks 02x01 Q&A une pantomime logorrhéique qui réussirait presque à faire passer en contraste la version kelvinienne de Zachary Quinto pour "fidèle" ! L’argument de la (relative) jeunesse a vraiment bon dos pour composer rien de moins qu’un anti-Spock.
Et puis, que dire d’un Spock qui ne manque jamais une occasion de sourire béatement (voire niaisement) tel un gobemouche, et qui se met quasiment à éjaculer lorsque Una lui monte dessus (pour atteindre la trappe supérieure du turbolift bloqué) !

Mais le passage peut-être le plus contestable de cette vignette tient au conseil que la sage Una se pique de prodiguer au padawan Spock, lorsqu’elle lui assène avec gravité et componction : « If you want to command, you’re gonna have to learn to keep your freaky to yourself. Even if that’s painful. »
Profond ! Mais surtout profondément irrespectueux du matériau existant. Car cette leçon de choses qui prétend s’ériger en rhème ou en nexus... illustre en réalité l’un des pires écueils du format prequel, à savoir le vampirisme usurpateur, consistant à déposséder l’œuvre initiale de son inhérence pour doter au forceps le prequel d’une incontournabilité causale. Ainsi, la personnalité de Spock de TOS ne résulterait plus de son identité vulcaine propre au croisement de deux ascendances, mais d’un conseil-en-kit délivré par une Terrienne durant un cinq à sept dans un ascenseur (et tant qu’à faire aussi d’une ambition personnelle de commandement). Voilà qui est enrichissant pour Spock et pour TOS...

Ainsi s’achève la seconde expérience d’écriture de Star Trek (après Short Treks 01x02 Calypso) pour Michael Chabon... avant d’hériter du showrunning de la nouvelle série Picard.
Pas follement encourageant ni rassurant..
Ok, c’est formellement moins mal écrit que la moyenne des épisodes de Discovery, et une patte d’auteur s’esquisse peut-être même en filigrane... Hélas la compréhension du paradigme trekkien n’est pas davantage au rendez-vous, et la pertinence des faire-valoir internalistes ne s’est jamais mesurée au poids.

Doit-on pour autant être pessimiste envers la série qui vient ? Difficile à dire. Les bandes-annonces somptueuses et les retrouvailles annoncées avec des personnages (et des acteurs vétérans) du Star Trek bermanien laissent évidemment rêveurs…
Faut-il encore que la très probable montée en qualité ne se limite pas au champ de l’illusion...

Mais pour l’heure, Michael Chabon ou pas, Short Treks 02x01 Q&A n’a rien d’un game changer ! Ceux qui ont réussi à aimer Discovery ne seront pas déçus, et ceux qui ont étrillé cette série ne seront pas dépaysés.
En somme, voici un mini-prequel du faux prequel Discovery, mais malheureusement pas davantage un prequel de TOS. D’autant plus Q&A est supposé se dérouler en 2254, soit l’année même de TOS 00x01 The Cage... ce qui en intradiégèse ne fait que souligner davantage le gouffre contextuel entre l’univers de Discovery et celui de la série originale.

Malgré tout, ce minisode s’accorde le temps de la respiration, et privilégie la psychologie (certes de bazar) au nawak événementiel sans queue ni tête habituel. Q&A possède en sus l’atout rare de nous épargner les présences invasives de Miss Mary-Sue-sauveuse-de-l’univers et de sa sidekick-tête-à-claque Sylvia Tilly. À l’inverse, entrevoir (même avec la brièveté d’un caméo) la bouille d’Anson Mount (campant un Pike toujours impeccable de dignité) n’est pas déplaisant.

Et puis, et puis... il suffit de se mettre au diapason... et se rincer copieusement l’œil ! Ben oui quoi, Rebecca Romijn est toujours aussi majestueuse, les années n’altèrent décidément en rien son sex-appeal. En plus, en si gros plan, comme dans un bon vieux porno millésimé nineties de Marc Dorcel, ça ne se boude pas quoi.

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité