Analyse
Par Yves Raducka
Un quatrième signal red burst se signale aux héros pour les guider impérieusement vers l’étape suivante (le monastère klingon le plus sacré) de leur insondable quête. Sautant ni une ni deux en spore drive vers l’orbite de la planète Boreth, l’USS Discovery est rejoint par le croiseur de combat D7 le chancelière L’Rell (sollicitée discrètement par Tyler). Celle-ci informera Pike de la fonction première du monastère (quoique dédié aux Followers of Kahless, l’inaccessible établissement a pour fonction première de garder un précieux élément natif de cette planète : le cristal temporel !). Dans le but de négocier auprès des moines un de ces cristaux (pour fabriquer un engin temporel afin d’envoyer dans le futur les archives de la Sphère rouge et peut-être secourir le Dr Burnham), Pike se soumettra à une série d’épreuves initiatiques sous l’égide du hiératique "timekeeper" Tenavik. Ce dernier se révèlera être le fils illégitime albino ("son of none") de Voq et L’Rell, déposé quelques mois avant dans le monastère (cf. DIS 02x03 Point Of Light) mais déjà adulte (grâce aux "propriétés temporelles" des lieux). Les cristaux permettront à Pike d’entrevoir dans la douleur son futur (expositions accidentelles aux Delta radiations qui le paralyseront à vie - cf. TOS 01x15+01x16 The Menagerie), mais Tenavik le soumettra alors à un choix : échapper à son destin tragique et renoncer au cristal, ou prendre le cristal et sceller son destin. Au nom des valeurs de Starfleet, Pike optera pour l’intérêt général et le sacrifice personnel.
Ayant obtenu l’autorisation de Saru (capitaine par intérim en l’absence de Pike), Burnham et Spock entreprennent de partir seuls dans une navette DSC 08 pour faire la peau à Control-Leland. En quelques minutes, ils rattrapent un autre vaisseau NCIA-93 de la section 31, apparemment encalminé, et tout son équipage expulsé dans l’espace et décédé… hormis un homme en combinaison, Kamran Gant. Dans le but d’en apprendre davantage sur les objectifs de Contrôle, Michael convaincra Gant de les guider – elle et Spock – à bord du vaisseau. En tentant de restaurer les systèmes, Control détectera leur présence et lancera le vaisseau à distorsion en direction d’une destination extérieure à la Fédération. Réussissant à éloigner Spock dans le cadre d’une prétendue stratégie de mise en quarantaine de Control, Gant se retrouvera seul avec Burnham et révélera alors être "assimilé" (on doit dire désormais "reconstruit") par les nanites dans le seul but de piéger Michael. Spock viendra à sa rescousse, tandis que Gant se révélera aussi invulnérable qu’un Terminator T1000 (les nanites reconstruisant instantanément les parties désintégrées de son corps). Finalement, c’est une marée de nanites qui s’échapperont de Gant à la façon de termites carnivores pour "s’emparer" de Burnham. Spock réussira à les immobiliser en magnétisant le sol.
Pour la très accessoire histoire C, l’ingénieure Reno, sensible à la déréliction sentimentale de son collègue Stamets, entreprend de sensibiliser le Dr Culber à la chance qu’il a de ne pas être veuf comme elle… La reformation du couple préféré des trekkers est donc pour bientôt.
Pike (en possession du cristal et au grand étonnement de L’Rell), Burnham et Spock sont tous de retour en orbite de Boreth… pour découvrir que la totalité de la flotte de la Section 31 (une trentaine de vaisseaux) a mis le cap sur l’USS Discovery. Visiblement Contrôle les téléguide tous et l’objectif est de s’emparer une nouvelle fois des données de la Sphere (qui permettront à l’I.A. de "become the purest form of conscious life in all existence"). Pike renonce à fuir au moyen du spore drive (au motif qu’il faudrait une supernova pour alimenter le cristal temporel – kamoulox ?), mais il programme l’autodestruction de l’USS Discovery tout en donnant l’ordre à Number One de rappliquer avec l’USS Enterprise pour évacuer l’équipage.
Dans sa forme et sa structure hollywoodienne, DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows est probablement l’un des meilleurs épisodes de la série à ce jour, tant il est bien filmé et sans temps mort (clair, lisible, visuellement très beau, notamment dans le cadre volcanique du monastère de Boreth), et tant il réussit à parfaitement exploiter les synergies entre personnages – Terriens, Vulcains, Klingons, Section 31 – tous désormais unis dans une même cause de survie universelle. Les héros sont très héroïques (Pike rayonne par son sens du sacrifice inscrit dans son futur depuis 1966), les méchants sont aussi gores que cauchemardesques (ah la vague de nanites à l’assaut des humains, c’est encore plus impressionnant que les Replicators de Stargate Atlantis...), et les adversaires d’hier (les Klingons) sont devenus aujourd’hui les sages Vorlons dispensateur d’énigmes transcendantes.
Malheureusement, sur les terrains du fond philosophique, de la cohérence narrative, de la logique factuelle, de la vraisemblance scientifique, du respect des psychologies et des sociologies, et même de l’épistémologie de la SF, DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows se révèle être l’un des épisodes les plus absurdes de la série à ce jour.
DIS n’a cessé de jongler avec le voyage temporel longtemps avant qu’icelui ne soit inventé dans TOS 01x08 The Naked Time. Qu’il s’agisse de l’engin à boucles temporelles de Mudd (dans DIS 01x07 Magic to Make the Sanest Man Go Mad) ou de la combinaison du Red Angel de la Section 31 (dans DIS 02x10 The Red Angel), le point commun de ces potentialités anachroniques reposait sur un objet mystérieux mais central : le cristal temporel à la provenance incertaine.
DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows prétend lever le voile sur ce mystérieux MacGuffin, sauf qu’il réussit à produire l’effet exactement inverse. Au lieu de le démystifier scientifiquement selon la grammaire de SF, il le mythifie selon les codes de la fantasy.
Dans un monastère de Boreth visuellement somptueux mais n’ayant en esprit et en philosophie rien de commun avec celui de TNG 06x23 Rightful Heir, le temporal crystal se révèle être un artefact spirituel, jalousement gardé par un "ordre" de sages (ou de Jedis) klingons sur lequel même la chancelière n’a aucune autorité, accessible via des épreuves initiatiques (the pillar of the past, the pillar of the present…) et des énigmes hautement cryptiques ("When the future becomes the past, the present will be unlocked"…), postulant un parcours initiatique sous la houlette d’un Yoda klingon et impliquant des révélations insurmontables sur soi-même (la plupart des cathéchumènes ont échoué, mais la noblesse altruiste de Pike lui permettra de remporter le trophée, à savoir un cristal pour son usage).
La simple existence de ses cristaux temporels connus "depuis toujours" (sic) par les Klingons – et que la chancelière L’Rell sait elle-même être l’arme suprême – introduit une chaînes d’inconsistances profondes :
- quant à la compatibilité avec la philosophie guerrière klingonne : ceux-ci détiennent l’arme suprême mais ils auraient eu la sagesse de ne jamais en faire usage (vraiment ?), même les bien moins bellicistes humains en auraient été incapables à travers leur longue histoire ;
- quant au discours 100% New Age et 100% anti-klingon tenu par le sage "gardien du temps" de Boreth ;
- quant au respect des stratégies passées de la Section 31 basées sur la certitude (avalisée par Tyler) de l’usage que les Klingons feraient forcément d’un tel pouvoir contre leurs ennemis ;
- quant au respect des causalités chronologiques, non pas seulement par l’ignorance de la simple possibilité du voyage temporel (notamment par Spock) dans TOS 01x08 The Naked Time, mais plus généralement par l’épistémologie même des sciences (en établissant que le voyage dans le temps était connu depuis Kahless, cela revient à poser avec le plus grand naturel que les propriétés fissiles de l’uranium étaient connues depuis Platon sans en mesurer les inconséquences corollaires en Histoire des sciences et des technologies) ;
- quant à la relation de l’UFP et des autres sociétés du Trekverse avec le voyage dans le temps (qui a toujours été un sujet de recherches et de développements scientifiques, non un artefact magique au centre de toutes les convoitises, et qui dans ce cas aurait forcément eu sa place dans le futur trekkien...).
Mais ces cristaux postulent également une redéfinition complète de la mécanique temporelle. Il n’est plus question ici de science et de causalité, mais de pacte et de destinée. Une nouvelle fois comme si le Temps était devenu une entité avec laquelle il fallait négocier et qui réclamait ses sacrifices humains périodiques (dans le prolongement des brouillons kurtzmaniens pour ST 2009 et KTL). Soit un basculement épistémologique complet de la SF dans la fantasy.
Ainsi, c’est par son sacerdoce religieux (régulant le "pouvoir temporel" du cristal) que Tenavik contrôle la vitesse de croissance des plantes et son propre vieillissement (il n’aurait dû être âgé que de quelques mois, mais il est désormais d’âge mur avec les connaissances et l’expérience d’un père supérieur ou d’un maître spirituel hiératique...).
De même lorsque Pike a enduré une vision tragique de son sacrifice futur pour sauver une promotion de cadets au prix d’une paralysie à vie, en science-fiction cela aurait dû conduire Pike à anticiper de façon proactive cet événement pour lui éviter de se produire (sauf s’il participait causalement du salut galactique). Mais en fantasy, c’est un "prix de destin" à payer – c’est-à-dire un "pacte de sang" avec le Temps – pour avoir une chance de vaincre Contrôle (alors que les deux événements ne sont pas causalement liés ni même corrélés, le handicap de Pike étant juste le marqueur d’une timeline où Contrôle n’a pas triomphé). Un marché de dupes de toute façon puisque la timeline alternative où Pike ne se retrouverait pas handicapé (comme s’il en existait que deux possibles !) impliquant selon cette même alternative artificieuse la mort de tous les êtres sentients.
Au-delà du symbole aussi christique (à la manière de la traversée du Jardin de Gethsemani où Jésus dut accepter son sort funeste car telle était supposée sa "mission") qu’anti-trekkien, ce paradigme dénature un univers agnostique (gouverné par les lois naturelles)… en le subordonnant à la prédestination du mysticisme et de la magie. Quoique l’essentiel pour les showrunners était probablement que Pike puisse exprimer sa profession de foi au moyen de l’une de ces formules mélodramatiques (et tire-larmes) dans la série a le secret (« You’re a Starfleet Captain. You believe in service, sacrifice, compassion... in love »).
C’est ainsi que la série DIS se contredit philosophiquement elle-même lorsque, dans le même temps, ses personnages ne cessent de marteler à la manière de mantras que chacun construit son destin et que la meilleure façon de combattre le futur est de considérer qu’il n’est pas écrit (quitte à ignorer pour cela les avantages purement stratégiques des voyageurs du futur). En somme, les truismes de la soft idéologie d’Alain (Émile-Auguste Chartier)… au service du pire totalitarisme cosmologique.
Soit une occasion de mesurer à quel point DS9 avait su quant à elle ne pas franchir ce Rubicon de la fantasy, car jamais les visions (ni même les voyages temporels) à travers les orbs des Prophets ne contredisaient les lois naturelles de la causalité.
Et comme pour souligner davantage cette dérive animiste, DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows fait dire au timekeeper Tenavik que les cristaux temporels sont « a namesake for Qo’nos », c’est-à-dire qu’ils auront donné à la planète mère klingonne le nom du dieu païen hellénique du temps (i.e. Chronos). Ce qui conduit subséquemment à un incompréhensible anthropocentrisme… sauf à suggérer que les Klingons auraient colonisé la Terre en des temps antiques (mais c’est impossible, car selon la chronologie du Trekverse, la découverte de la distorsion par les Klingons est très ultérieure au Panthéon grec).
La planète Chronos avait toujours été considérée comme une anglicisation commode du klingon Qo’nos sans aucune forme de rapport avec les mythologies terriennes. Idem pour Romulus (et Remus) sans relation causale avec la ville de Rome et son origine légendaire (tout au plus un traduction symbolique à la manière de la romanisation du mandarin).
Mais à partir du moment où l’univers Star Trek bascule dans la fantasy, son cosmos entier ne peut que graviter autour de la Terre, de ses mythes et de ses religions. Et non sans hasard, depuis le début de la seconde saison, il n’est pas un épisode qui ne fasse pesamment référence aux croyances judéo-chrétiennes, cette fois-ci par le titre même de l’épisode, tiré du Psaume 23 de la Bible.
La fantasy étend également sa cape simplificatrice sur l’articulation même des évènements. Les dei ex machinae sont tellement intégrés dans les réflexes et les déontologies professionnelles des protagonistes que ces derniers en arrivent à s’organiser épisode après épisode autour de l’attente messianique des red bursts, désormais nommés simplement signaux, et intégrés dans une prophétie millénariste (les Révélations sont au nombre de sept, ni plus ni moins, et DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows représente la quatrième, on attend donc avec impatience les trois dernières...). La seconde saison de DIS a ainsi instauré un rapport de dépendance, non pas exceptionnelle mais systémique, envers une puissance supérieure de facto, supposée guider les pas des héros à travers la galaxie, faisant d’eux les instruments de l’eschatologie (voire de la sotériologie), et dont la supposition périodique qu’elle relève elle-aussi d’un intervenant du futur (à l’instar du Red Angel), n’exonère en rien la série des travers résultant de la dépossession de paternité d’une relation de subordination à la transcendance. La froideur d’une SF sans complaisance où les formes de vie sont livrées à elles-mêmes cède ici la place à la démagogie d’une espérance propitiatoire où tout est supposé avoir un sens caché (appelé ou non à être révélé).
Si ça se trouve, la fin de la seconde (ou désormais de la troisième) saison proposera une démystification pleinement science-fictionnelle, mais cela n’effacera pas un déroulé et une construction qui en renie tous les fondements. À l’instar d’une vie entière agenouillée dans la religion pour révéler seulement au seuil de la mort que ce n’était qu’une blague.
DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows révélera que l’USS Discovery demeure toujours affligé des archives visiblement indélébiles de la Sphère. Mais si tel était le cas, quel était le sens de les avoir copiées dans la combinaison limitless du Red Angel pour les envoyer dans le futur à la fin de DIS 02x11 Perpetual infinity (tout en les exposant à l’appropriation par Contrôle-Leland à la surface d’Essof IV). Si l’original n’a pas disparu, alors cette manœuvre constituait une aggravation du risque, consistant à multiplier les sauvegardes (au risque en outre de les voir toutes devenir indélébiles)…
Séparés depuis DIS 02x03 Point Of Light, les retrouvailles entre L’Rell et Tyler - parents mortifiés de Tenavik - est un grand moment soapy, mais au croisement de Beverly Hills 90210 et de Dark Shadows (1966-1971). La romance féconde mais inassumée entre la chancelière de l’impitoyable Empire klingon et du Torchbearer de T’Kuvma (devenu agent de la Section 31) ressemble ici en tout point... à une romance entre ados (mêmes postures, même maniérisme, mêmes poncifs) ! Tandis que les épouvantables partis pris artistiques de DIS auront réussi à progressivement transformer L’Rell en hybride improbable d’une momie prépubère et d’une zombie décomposée. Entre mauvais goût et surréalisme involontaire, on flirte ici avec Plan 9 From Outer Space.
Ivre de colère, et même sous l’emprise d’une rage inextinguible (de son propre aveu) qui sied toujours aussi mal à son éducation vulcaine, Mary-Sue veut venger par n’importe quel moyen Gabrielle, sa mère n°1 (sachant qu’elle a tout de même le privilège d’en totaliser quatre), sauvagement renvoyée dans le futur à la fin de l’épisode précédent (Contrôle-Leland l’ayant privée de la promesse de retrouvailles que, dans le timeframe d’un épisode, elle s’était mentalement construite).
Et tandis que Mirror-Georgiou est partie elle-même traquer le premier drone de l’I.A. meurtrière avec les moyens de la Section 31, et alors que Starfleet emploie également (du moins il faut le supposer) toutes ses ressources pour retrouver et circonscrire le vaisseau fugitif, c’est dans une simple navette DSC 08 que l’héroïne prétend vaincre Control et ses serviteurs/victimes… sur la base du rapport manquant d’un vaisseau de la Section 31.
Que l’USS Discovery se tienne à l’écart de la traque collective de Control, cela fait sens, étant donné que le vaisseau dispose des archives de toutes les convoitises. Mais pour le reste, l’épisode témoigne d’un imbroglio tactique à la limite de l’intelligible. Le vaisseau de Contrôle-Leland est clairement immatriculé et identifié, par conséquent même s’il est furtif et qu’il n’est pas possible de le traquer à distorsion, il ne devrait pas être possible de le confondre avec un autre vaisseau de la Section 31. Et au regard de la gravité des enjeux, la seule consigne réaliste donnée par Starfleet Command aurait dû être pour tout vaisseau de Starfleet, de la Section 31, ou toute station spatiale… de le descendre à vue (en dépit d’un équipage potentiellement non infecté). Pourtant, la base du raisonnement de Burnham est de traquer toutes les anomalies de rapport comme si le vaisseau le Leland pouvait être confondu avec n’importe quel autre de la Section 31 (serait-il devenu une structure métamorphe ?).
Si maintenant, le manquement à un check-in est l’indicateur potentiel d’une attaque du vaisseau de Leland, alors comment se fait-il que ce ne soit pas tout Starfleet qui s’en préoccupe (disposant tout de même de milliers de vaisseaux dixit la série dans un épisode antérieur), mais uniquement l’héroïne avec des moyens de traque ridicules ! Car seul un vaisseau de puissance de feu équivalente ou supérieure à celui de Leland (en supposant que Control n’ait pas apporté des modifications à la façon des Borgs ce qui ne serait guère cohérent au regard de son origine endogène) possède la capacité de l’affronter. Quel sens cela a-t-il alors de prétendre pouvoir faire la différence avec une simple navette spatiale ?
En outre, une absence de rapport à heure fixe ne constitue pas une indication de localisation. Pourtant, la navette de Burnham et Spock saura exactement où aller et y arrivera en seulement en deux minutes chrono ! Au moins, l’une des rares homogénéités de la série tient à son micro-univers...
Le vaisseau de la Section 31 apparemment abandonné, avec tout son personnel trépassé dans l’espace, respirait le piège à plein nez. Pourtant supposément traumatisés par l’expérience du QG de la Section 31 puis par la reconstruction/assimilation de Leland, à aucun moment Burnham et Spock ne soupçonnent le seul survivant, Kamran Gant (ancien tacticien de l’USS Shenzhou, le monde discoverien est toujours bien petit) d’être sous l’emprise des nanites (un tricordeur ou au pire un téléporteur aurait permis de s’en assurer). Et les héros foncent alors tête baissée dans l’antre d’un vaisseau, qui de l’aveu même du survivant, est sous l’emprise de Contrôle. Avec une stratégie aussi inconséquente et irresponsable, faut-il encore s’étonner qu’aussitôt entrés, le vaisseau en question passe en distorsion vers une destination inconnue, et que Kamran révèle son vrai visage (mort dans l’espace, puis ressuscité et reconstruit par Contrôle) ?
Après avoir fait une nouvelle fois la démonstration de son invulnérabilité à tout tel un Terminator T-1000, pour une scène pugilistique désormais familière, c’est une véritable marée de nanites qui sortent Contrôle-Gant pour prendre possession du corps de Burnham. L’effet est spectaculaire mais aucunement réaliste lorsque rapporté à l’échelle microscopique de telles nano-machines, supposées coloniser un système vasculaire et non l’espace. La série fait visiblement une confusion entre les nanites qui peuvent investir un être vivant pour le réparer, le modifier et/ou le contrôler (mais pas au point de substituer en volume et en poids à toute sa structure biologique à l’exemple des redoutables nanites borgs ayant mis en danger toute la Fédération un siècle après)… et entre le concept des réplicateurs qui, s’ils sont microscopiques, peuvent émuler n’importe quelle forme humanoïde sans s’appuyer sur une quelconque structure biologique. Visuellement, l’épisode fait surtout passer ces colonies de nanites pour des créatures métamorphes (à la manière des Founders de DS9)…
Dans un timing hautement improbable, Spock découvrira leur point faible (il est rassurant pour la suite de la série qu’il y en ait un), à savoir une magnétisation du sol selon des paramètres précis. Il serait toutefois permis de s’interroger sur la cohérence de ce talon d’Achille lorsqu’on sait que la plupart des métaux ne sont pas magnétiques tandis que la cohésion ne peut être que moléculaire (nucléaire faible) à cette échelle.
Spock et Burnham réussiront à éliminer Contrôle de l’ordinateur de bord du vaisseau par un simple reboot manuel. Une solution tellement simple et rapide à mettre en œuvre (en gros on éteint et on rallume comme pour les bons vieux PC) qu’il est bien curieux qu’elle n’ait pas été appliquée sur tous les vaisseaux de la Section 31 pour ne laisser aucune chance de survie à Contrôle dans un quelconque recoin des systèmes informatiques (au contraire du vaisseau de Leland). Cette résolution parait d’autant moins crédible lorsque l’épisode s’achève par une flotte entière de vaisseaux de la Section 31 tombée à la merci de Contrôle, et prenant d’assaut l’USS Discovery. Faut-il vraiment croire que Burnham et Spock ont réussi seuls là où l’intégralité de la redoutable Section 31 a échoué ?
En retour, avant d’être anéanti, Contrôle-Gant révélera que toute cette stratégie (vaisseau à l’abandon, équipage expulsé dans l’espace, un seul survivant reconstruit...) n’avait aucun autre objectif que de s’emparer de Burnham (pour accéder à l’archive sur l’USS Discovery). Que d’attention pour une seule personne ! Outre de persister dans le syndrome de l’univers Michael-centré (n’importe quel autre équipier de l’USS Discovery aurait tout aussi bien fait l’affaire si c’était là le seul objectif), quelle crédibilité accorder à une construction de Contrôle reposant sur une absolue imprévisibilité (l’opération lancée par Burnham ne répondant à aucune logique opérationnelle) ?
Toujours est-il que Michael et Spock en déduiront que le véritable ennemi de Contrôle est Burnham (on savait déjà), car elle représenterait toujours la "variable incontrôlée" dans le plan de Contrôle (c’est-à-dire la superhéroïne qui va sauver l’univers).
Assailli par toute la flotte de la Section 31 (et pourquoi pas toute celle de Starfleet ?) aux cyber-mains de Contrôle (comment est-ce possible si Starfleet a vraiment fait son travail ?), Pike prend la décision courageuse qu’il aurait dû prendre à la fin de l’épisode précédent, à savoir lancer l’autodestruction du vaisseau faute de pouvoir effacer les archives de la Sphère.
Seulement voilà, ce qui aurait été pertinent dans l’épisode précédent parait ici absurde étant donné que même sans le bénéfice des archives de la Sphère, Contrôle et ses trente vaisseaux de la Section 31 représentent une menace majeure. Or l’USS Discovery conserve l’atout unique (la possibilité de se matérialiser n’importe où dans l’univers) et pleinement fonctionnel (comme l’a montré le début de l’épisode) du spore drive. Dès lors, il est incompréhensible de renoncer à un pareil avantage stratégique par rapport à la flotte de Contrôle (même configuration que durant la guerre contre les Klingons), qui plus est en évacuant l’équipage sur l’USS Enterprise (alors que ce dernier ne dispose d’aucun moteur mycologique).
Et comment se fait-il que l’USS Discovery se retrouve seul face à toute la flotte de la Section 31 lorsque Starfleet dispose (parait-il) de milliers de vaisseaux (dans la Fédération discoverienne) ?
En outre, l’obsession de l’équipage - désormais équipé d’un cristal temporel (mais nécessitant d’être alimenté par une supernova !) - consiste toujours à vouloir envoyer les archives dans un futur inconnu. Encore cette rengaine nonsensique, déjà expérimentée dans l’épisode précédent sans pour autant endiguer la cause première...
DIS 02x12 Through The Valley Of Shadows a beau dispenser un beau spectacle et quelques sympathiques interactions entre personnages, son histoire est un château de carte branlant qui ne survivra pas à la moindre brise. Les postulats, les contextes, les stratégies, et les finalités entrainent comme jamais Star Trek dans un royaume enchanté gouverné par la seule magie, les deus ex machina, les Révélations, la prédestination, et le bon vouloir (aux câbles fluos) des scénaristes.
Quoique toujours aussi nombriliste au sein de son univers de poche, le soap ruisselant des épisodes précédents a cédé en partie la place ici à une fantasy foncièrement anti-SF, recyclant une énième photocopie délavée du monomythe campbellien dans un ersatz de Lord Of The Trek.
Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité