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Le virtuose de l'évasion
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Critique
Par Frank Mikanowski

Alors, on ne va pas se cacher derrière une console de l’Enterprise, le personnage d’Harry Mudd me sort littéralement par les yeux. Que ce soit la version sixties interprétée par Roger C. Carmel ou la version Discovery par Rainn Wilson, je suis totalement allergique au cabotinage du personnage. La probabilité que j’aime ce mini épisode était donc proche du néant absolu.

Et effectivement, The Escape Artist est une pure torture, tout du moins ses 10 premières minutes. Capturé par un chasseur de primes qui le délivre à une de ses nombreuses victimes extraterrestres, le "zéro" essaye par sa gouaille de sauver son existence. Niant d’abord les faits, puis essayant de faire flancher la volonté de son geôlier, on subit pendant une dizaine de minutes le débit sans fin du roublard voleur. Et on découvre, par des flash-backs, que loin d’être des improvisations, Mudd a déjà de nombreuses fois procédé de cette manière pour se sortir d’un mauvais pas.

J’avais remarqué, qu’une des scènes impliquait des Orions. C’était à la limite, un des seuls points de l’épisode que j’avais envie de voir. Hélas, c’est certainement un des flash-backs les plus mal joués.

On partait donc vers une note la plus basse possible, mais c’était sans compter avec une révélation finale qui a réussi à me surprendre et à me décrocher un sourire. Bref un miracle. Si ce final m’a fait relativiser la catastrophe, j’ai eu quand même une pensée pour Yves qui a du gravement s’étouffer de rage tant cette fin, si elle est plutôt pas mal pour sa surprise, est en fait une hérésie totale voire une insulte à la continuité trekienne.

Message à la production de Discovery : par pitié, oubliez ce personnage pour la saison 2 de la série.

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité

Analyse
Par Yves Raducka

S’il existe presque autant d’appréciations de Star Trek qu’il y a de trekkers dans le monde, certaines (rares) questions parviennent néanmoins à faire l’unanimité parmi les connaisseurs. Ainsi, le personnage de Harry Mudd (alias Harcourt Fenton "Harry" Mudd dans sa dénomination complète) représente – de l’avis général – l’un des pires points faibles de la série originale, voire un moment tellement embarrassant au sein des quarante années de production historique qu’il gagnerait à être pudiquement oublié aujourd’hui.
Il est donc particulièrement symptomatique que la série d’Alex Kurtzman s’acharne à exhumer cette "verrue narrative" des oubliettes, épisode après épisode. Les pantomimes ubuesques du personnage nous avaient déjà été infligées dans Discovery 01x05 Choose Your Pain, et surtout dans Discovery 01x07 Magic To Make The Sanest Man Go Mad – ce dernier pouvant même se prévaloir d’être à ce jour l’épisode le plus pathétique d’une série pourtant déjà très médiocre. Mais visiblement, cela ne suffisait pas… Les executives de CBS ont manifestement le désir de faire boire aux trekkers le calice de cigüe jusqu’à la lie… ce qui – au passage – en dit long sur leur mépris aussi bien envers le Trekverse qu’envers les fans…
Certes, un prequel bien né peut courageusement s’imposer de revisiter systématiquement toutes les facettes – y compris les moins glorieuses – d’un univers préexistant, à condition toutefois d’avoir l’ambition de le crédibiliser en profondeur… comme s’y était si bien employée la série Enterprise sous l’égide de Rick Berman.
Mais rien de tel avec Discovery qui se contente de puiser sans vergogne dans la sémiotique la plus éculée de quarante années de Star Trek au profit de scripts plus clinquants que cohérents, et qui jamais – non jamais ! – ne cherchent à grandir rétroactivement d’une quelconque façon l’univers trekkien historique. Bien au contraire...
Pareille exploitation aussi grossièrement univoque porte un nom : la prédation... ou le vandalisme décomplexé !

Le déroulement de Short Treks 01x04 The Escape Artist est tellement simpliste qu’il peut tenir sur un ticket de métro : Harry Mudd a décidé d’exploiter commercialement sa mauvaise réputation – ou pour être plus concret la récompense offerte par Starfleet pour sa capture – en fabriquant en série des androïdes à son image (physique et mentale) puis en les "vendant" à tout ce que la galaxie compte de chasseurs de primes… mais en leur faisant croire à chaque fois qu’il s’agit du véritable Harry Mudd.
Sauf que, afin de se conformer à la politique du "twist pour le twist" de la série tout en paraissant plus malin qu’il ne l’est, le scénariste de l’épisode – Mike McMahan – a comme de bien entendu permuté le thème et le rhème... Dès lors, ce n’est qu’à la fin du minisode que "le" Mudd sur lequel l’épisode avait porté toute son attention s’avère n’être qu’une copie androïde – parmi de nombreuses autres – de l’escroc original, au grand dam du chasseur de prime tellarite (en référence probablement à celui de ST ENT 02x25 Bounty) qui s’est ainsi "fait avoir" comme nombre de ses homologues (et peut-être aussi comme pas mal de téléspectateurs).
Bref, encore et toujours cet artifice resucé de prestidigitateurs de foires... qui pourra encore en épater quelques-uns même après s’être enfilé ad nauseam des vagues et des vagues de séries TV hautement manipulatoires (de Lost à son épigone Discovery). Quand la "géométrie de la surprise" devient l’ultime cache-misère...

Réussir à aligner autant d’incohérences et d’inconséquences en seulement 15 minutes tient du record Guinness.

Bien entendu, le viol qui s’impose immédiatement à l’esprit du spectateur est celui de Data - figure hautement emblématique de la cybernétique TNGienne et même trekkienne en général.
Pourtant, ce viol en dissimule un autre, moins évident mais nettement plus caractérisé, à savoir... rien de moins que celui de TOUS les épisodes consacrés à la robotique dans la série originale !
En effet, aussi bien dans ST TOS 01x09 What Are Little Girls Made Of ? (le savoir de l’antique civilisation d’Exo III qui fit perdre la tête au Dr Roger Korby), dans 02x12 I, Mudd (la découverte du laboratoire scientifique des Makers), puis dans 02x22 Return To Tomorrow (l’héritage cybernétique de l’antique Sargon)… la grande Histoire trekkienne avait introduit des technologies permettant la copie parfaite du corps et de l’esprit des humains dans des enveloppes robotiques (il était donc question de constructs et non d’I.A. au contraire des créations de Noonian Soong un siècle après). Néanmoins, il s’agissait alors dans ST TOS d’authentiques révolutions coperniciennes ou technologies disruptives... suscitant fort légitimement la plus grande prudence des héros et des institutions.
Il est donc totalement impensable que plus d’une décennie avant – timeframe de Short Treks 01x04 The Escape Artist –, de telles technologies aient été monnaie courante au sein de l’UFP, au point d’être totalement snobées par Starfleet et à la portée des escrocs.
À moins que… l’intention inavouable (l’acte manqué ?) des "auteurs" de Discovery soit de faire passer rétrospectivement l’équipage de James T Kirk et l’utopique Fédération de TOS pour un improbable gang de bras cassés, imbéciles et amnésiques.

Visiblement, à chaque fois que Harry Mudd est au centre d’un épisode de Discovery, la continuité trekkienne se voit rageusement profanée.
Dans Discovery 01x07 Magic To Make The Sanest Man Go Mad en 2256, Mudd utilisait – dans l’indifférence générale – une machine temporelle (portative qui plus est)… alors que le voyage dans le temps sera pourtant découvert – et encore par pure sérendipité – seulement à la fin de ST TOS 01x06 The Naked Time en 2267, soit onze ans après !
Eh bien désormais, dans Short Treks 01x04 The Escape Artist au voisinage de 2250, Mudd se retrouve capable de fabriquer et inonder la Fédération de répliques artificielles ISO de lui-même (et donc de n’importe quel être vivant), soit quinze années avant que cette simple possibilité ne soit portée à l’entendement de l’humanité (à partir de ST TOS 01x09 What Are Little Girls Made Of ? en 2266) !
Les auteurs-producteurs de Discovery sont vraiment des cadors : non contents d’infliger pathologiquement à leur série le syndrome du micro-univers (un environnement d’envergure galactique, et pourtant toujours les personnages de TOS que l’on croise et que l’on recroise...), non contents de tenter de recycler – sous couvert "d’hommage" – le propos faussement humoristique de ST TOS 02x12 I, Mudd... ils révèlent ne strictement rien comprendre aux implications (et aux contraintes) – aussi bien causales que temporelles – du véritable Star Trek. À tel point que leur prétendu "prequel" (pourtant en soi l’exercice le plus difficile et le plus subtil qui soit) se vautre quasi-systématiquement dans une parodie bien grasse et profondément cuistre de la série originale… qui n’aurait même pas eu sa place dans les épisodes les plus loufoques de Futurama.
Un triste cas d’école.
Bah ! Mudd étant associé dans la culture populaire à une histoire de répliquants robotiques depuis la série originale, il fallait donc que Mudd soit également associé à des répliquants robotiques dans ce pseudo-prequel. Il est probable que le scénariste de ce minisode confonde même totalement l’avant et l’après, la cause et l’effet... Mais au fond quelle importance vu que les contextes, la flèche du temps, les relations causales, la logique, la cohérence... tous ces "détails" n’intéressent que des geeks et des trekkers, en aucun cas la presse et les "avis autorisés".

Mais le naufrage ne s’arrête hélas pas là. Car une fois de plus, Discovery se contredit profondément elle-même ! Si Harry Mudd est bien un individu qui n’a aucun scrupule à déployer un business model sur les mensonges et les manipulations inhérentes à sa propre personne (consistant à se jouer systémiquement de toute confiance qu’il pourrait susciter chez autrui), alors il n’est pas psychologiquement consistant que ce même Mudd ait déployé autant d’effort pour se venger (dans Discovery 01x07 Magic To Make The Sanest Man Go Mad) de la défiance de Gabriel Lorca envers lui. Car tout tropisme de vengeance résulte de la valeur intrinsèque attribuée aux paradigmes relationnels, ce dont le personnage (caricatural et invraisemblable) mis en scène dans Short Treks 01x04 The Escape Artist n’a aucunement cure.

Outre de contredire sa propre caractérisation d’une apparition à l’autre au sein de la série, le Harry Mudd de Discovery n’a finalement pas grand-chose en commun avec celui de TOS. Le triste sire du faux Star Trek est non seulement bien plus vénal et amoral que n’importe quel Ferengi de ST TNG et de ST DS9, mais il va jusqu’à perpétrer des meurtres de masse ! Tandis que l’irritant coquin de TOS et TAS demeurait essentiellement un aventurier picaresque en marge des normes sociales et sans aucun sang sur les mains...
Pareille confusion relève-t-elle de l’inculture la plus crasse ou du sophisme le plus éhonté ?

Accessoirement, le casier judiciaire des infractions, des délits, et des crimes de Harcourt Fenton Mudd dévidé complaisamment par Short Treks 01x04 The Escape Artist est totalement distinct de celui de ST TOS 01x03 Mudd’s Women.

Quant au Tellarite (interprété par Harry Judge), doté de curieuses protubérances – pour ne pas dire des "cornes" – maxillaires évoquant plutôt les Nausicaans, il présente des différences morphologiques majeures par rapport à tous les ressortissants de son espèce apparus aussi bien antérieurement (dans ST ENT) qu’ultérieurement (dans ST TOS).
Manifestement, Discovery ne peut s’empêcher de rebooter physiquement (voire comportementalement) chacune des espèces extraterrestres historiques de ST (pas seulement les Klingons)… et cela sans raison, sans explication, et sans autre objectif que le doigt d’honneur mouillé de pouvoir le faire !
Et après, il faudrait que les trekkers s’en accommodent benoîtement, qu’ils gobent dévotement les discours officiels calibrés des powers that be et autres "avis autorisés"…

En tout état de cause, il serait grand temps que les wikis à la mode et aux prétentions encyclopédiques (tels Wikipedia, Memory Alpha…) révisent leur logiciel et aient l’indépendance (le courage ?) d’établir sans ambiguïté que Discovery n’appartient pas davantage à la timeline du Star Trek historique que le reboot cinématographique de 2009.
Et NON, il ne suffit pas qu’Alex Kurtzman répète en boucle à qui veut bien l’entendre que Discovery et TOS partagent la même ligne temporelle pour que ça soit réellement le cas ! Seul le contenu – sonore et visuel – à l’écran fait foi.
Gene Roddenberry en avait lui-même "fait les frais" lorsqu’il avait "anathématisé" (i.e. lorsqu’il avait tenté d’exclure du canon) ST TAS puis ST V The Final Frontier... en vain ! La "parole" des mercenaires de Leslie Moonves serait-elle soudain plus "sacrée" que celle du créateur même de Star Trek ?!
Parce que si l’on fait le bilan de la première saison de Discovery et de son extension (très facultative) Short Treks, il s’en dégage une masse critique patente d’incompatibilités chronologiques objectives non seulement vis-à-vis de TOS, mais également vis-à-vis des séries bermaniennes sises au 24ème siècle. Et ladite masse critique pourrait même – si si ! – rendre des points aux trois films de la Kelvin timeline – qui avaient pourtant quant à eux la franchise d’assumer d’emblée la divergence.

Le reboot de 2009 était-il alors intellectuellement moins malhonnête que Discovery ? Ou bien... était-il en réalité le plug anal (préparatoire) à la délicate attention du fist-fucking collectif (et industriel) qui allait s’ensuivre ?
Ben oui, en procédant par étapes, c’est supposé faire moins mal et donc provoquer moins de cris...
Raté ?

0/5 (même si le système de notation d’Unif ne permet officiellement pas de descendre en dessous de 1/5)

Cette ligne de programmation ne sert qu'a formaté proprement les lignes de textes lors d'un utilisation sous Mozilla Firefox. J'aimerais pouvoir m'en passer mais je ne sait pas comment, alors pour l'instant. Longue vie et prospèrité